Un soir du monde, un ami est mort. Lazare est mort, et Jésus est bouleversé. Lazare est mort, et ses sœurs sont effondrées. Alors Jésus vient, réconforte et se rend au tombeau. Après avoir fait rouler la pierre, il dit d'une voix forte : « Lazare, sors dehors ! » Et il sortit du monde des ombres.
Jésus de poursuivre : « Déliez-le et laissez-le aller » (Jn 11). Un mort est revenu chez les vivants. De la vie a été arrachée à la mort qui la tenait captive. Force inouïe et unique de l'amitié de Jésus. Divine douceur.
Un soir sur le monde, l'Ami par excellence, l'Ami de tous les délaissés, l'Ami des plus fragiles est mort, lui aussi. Assassiné. Exécuté afin de ne pas déranger l'ordre établi qui prétend garder maîtrise sur Dieu.
Quelque temps avant son arrestation, il disait à son Père : « Ceux que tu m'as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi » (Jn 17,25-26). Cet homme-là, ce passeur, a été séparé des siens par la Croix et par la mort. Tout semble alors fini. Pour les ennemis comme pour les amis. Pour les puissants comme pour les humbles. Nuit obscure du monde, d'hier comme d'aujourd'hui. Mais voilà, une femme veille.
Une femme aura suffi pour que s'inaugure le matin du monde. Marie de Magdala se lève, alors que « la ténèbre était sur les eaux » (Genèse 1,2), au creux de la nuit encore, de la peur, de la fatigue et de l'incompréhension. Elle part seule vers le tombeau de Jésus. Pourquoi ? Nul ne sait. Sinon que son amour fait aller ses pas.
Marie de Magdala, elle, témoin de la Croix, témoin de la mort. Présente jusqu'à la fin. Témoin alors de l'eau et du sang jaillis du côté du crucifié : la vie ne saurait être retenue par les clous et déjà se transmet pour tous. Inouï de l'amitié de Jésus pour son peuple. Pour tous. Partager non la mort, mais la vie encore et encore. L'offrir, gratis.
La Madeleine, sœur de tous les perdus du monde, de tous les aimants du monde aussi, s'élance, seule réponse possible à tous les pourquoi, du sein même de la perte de l'Aimé. Elle vient pour se tenir là. Simplement. Encore au plus près, comme durant la vie de Jésus.
Opiniâtreté des femmes, dans la nuit. Mais la ténèbre a été fracturée : de la mort, auprès de laquelle elle vient se recueillir et qu'elle ne trouve pas, elle repart aussitôt vers la vie. Courir, dire, revenir avec d'autres.
Elle ne cherche ni explication ni preuves. Elle ne fait pas d'enquête. Juste une divine douceur : un tombeau scellé a été ouvert. Un tombeau extérieur : celui du Jésus le Nazaréen. Un tombeau intérieur : en elle.
Pierre et le disciple que Jésus aimait arrivent. Ils entrent, ils voient. Quoi donc ? Le plein d'une présence. Mais pas celle de la mort. Des signes attestent pourtant qu'elle est bien passée par ici : les bandelettes et le linge qui enveloppaient le visage sont là. Oui, il était bien mort. Mais la mort a disparu.
Quelle présence alors ?
Celle d'une vie qu'on ne peut saisir, du souffle du Vivant qui poursuit sa course. Pour ouvrir les tombeaux des vivants. Divine douceur du matin du nouveau monde. L'amitié de Dieu fait toutes choses nouvelles.
Un peuple nouveau va naître. Non du sang, non de la terre ni des pouvoirs ou des savoirs, mais de l'amitié incomparable du Père pour le Fils. De l'amitié du Fils pour toute femme, tout homme dont le cœur est ouvert. Un peuple nouveau va naître. De l'amitié de Dieu pour ce monde renaissant.
VÉRONIQUE MARGRON
LA VIE
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