21 « Vous avez appris qu’il a été dit aux anciens : Tu ne commettras pas de meurtre, et si quelqu’un commet un meurtre, il devra passer en jugement.
22 Eh bien ! moi, je vous dis : Tout homme qui se met en colère contre son frère devra passer en jugement. Si quelqu’un insulte son frère, il devra passer devant le tribunal. Si quelqu’un le traite de fou, il sera passible de la géhenne de feu.
23 Donc, lorsque tu vas présenter ton offrande à l’autel, si, là, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi,
24 laisse ton offrande, là, devant l’autel, va d’abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande.
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En lisant les textes proposés à notre méditation pour ce dimanche je pensais à la violence et à la haine qui traversent le monde.
Je pensais aux Evangiles, à l’annonce de la Bonne Nouvelle qui nous révèle que l’amour est le principe de l’agir divin. Je m’émerveillais de cette révélation qui est pourtant cachée à tant d’hommes portant le fer et le feu au nom de Dieu.
Et je me demandais aussi comment des hommes et des femmes se disant chrétiens avaient pu interpréter ces textes portant le témoignage d’amour de la Parole de Dieu, du sacrifice du Fils de l’homme et de sa résurrection dans un sens qui a permis des oppressions et des violences physiques et morales sur des générations de croyants et de païens.
Le Dieu auquel nous croyons est amour et ce Dieu d’amour est le Dieu de tous les hommes qu’ils en aient conscience ou pas. Jésus nous a révélé que nous avons tous, lui y compris, le même père aimant et que nous sommes en conséquence tous frères, tous membre d’une fratrie catholique, universelle. Nous chrétiens, nous le savons et le savoir nous donne une responsabilité personnelle vis à vis de tous les hommes que nous côtoyons.
Cette responsabilité c’est celle d’aimer. Selon que nous aimons ou pas nous faisons de notre environnement un paradis ou un enfer; nous redressons l’autre et nous le ressuscitons ou nous le brisons, nous le tuons ou nous le transformons en démon.
Dieu est amour et il ne demande en réponse à son amour que notre amour, un amour qui passe obligatoirement par l’amour de l’autre, l’amour de notre prochain, de celui que nous croisons au quotidien et que nous ne voyons peut-être pas parce que notre regard est soit trop tourné vers nous-même et notre petit monde soit tourné trop loin vers d’autres horizons plus rêvés que réels.
La loi divine de l’amour est la source de toute morale et de tout bien, de ce qui en nous distingue le bien du mal. Quiconque la transgresse est pécheur, en d’autres mots quiconque offense l’amour, quiconque fait un acte qui n’est pas inspiré par l’amour s’éloigne de Dieu, de son sein maternel qui donne la vie et il meurt. Dans ces conditions qui ne pêche pas? Qui ne meurt pas mille fois par jour? Nous sommes tous pécheurs et de grands pécheurs qui ne pouvons espérer de Dieu que sa miséricorde aimante.
Seigneur, pardonne-nous, car nous ne savons pas ce que nous faisons.
Jésus nous le montre sans prendre de gants. Si nous ne savons pas ce que c’est qu’offenser la loi d’amour et si nous n’avons pas conscience du drame qui se joue dans une simple parole moqueuse envers un de nos semblables Jésus se charge de nous le faire comprendre sans ménagement.
Ses paroles secouent notre quiétude de “braves gens”. Il nous dit en substance : “ Vous vous croyez bons, généreux, gentils, respectables parce qu’assumant vos devoirs familiaux, professionnels et même religieux, donnant volontiers un coup de main aux amis, faisant à l’occasion du bénévolat et des dons aux œuvres de charité, et bien moi je vous dis : vous agissez le plus souvent comme des meurtriers de la pire espèce!
Oui des meurtriers et même des meurtriers récidivistes!”
Et pour nous le faire comprendre, lui qui est Dieu, lui dont la parole est celle de Dieu, qui est Parole de la Vérité incarnée, il nous explique que le moindre mouvement d’humeur ou de colère, que le moindre manque de respect, la moindre parole mal intentionnée, une simple raillerie envers une autre personne que nous même est pire qu’un meurtre et mérite jusqu’à la damnation éternelle!
Il dit “mérite” et non pas “sera condamné à”. Il ne nous juge pas mais il veut nous montrer ce qu’est dans l’absolu de la justice divine la gravité de l’offense faite à Dieu par un petit manquement à l’amour de notre prochain.
Il nous fait sentir qu’un acte sans amour comme la colère envers un de nos frères brise le cœur de Dieu et brise ainsi le lien filial qui nous unit à Lui.
Au fond ce que dit Jésus c’est que la racine du meurtre, des guerres, des violences se trouve déjà dans nos pensées ou nos paroles négatives vis à vis de notre prochain.
C’est ce qu’on pourrait appeler l’”effet papillon” du mal.
Et c’est pourquoi les pères spirituels conseillent de bénir au lieu de maudire même et surtout ceux qui nous font du mal. Ils nous enseignent que quand vient en nous une pensée négative et avant qu’elle ne prenne racine dans notre conscience ou s’exprime par une parole ou un geste nous devons avoir le réflexe de la bénédiction intérieure.
Jésus va encore plus loin en nous disant de nous réconcilier pendant que nous sommes en chemin avec notre frère, donc pendant le temps de notre vie, même si ce frère a du ressentiment envers nous, même s’il est notre adversaire, même si c’est lui qui est injuste et dans son tort.
Un peu plus loin dans le récit il dira avec l’autorité du Fils de Dieu : « Mais moi, je vous dis: Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous font du tort et vous persécutent [ Matthieu 5, 44]»
Et Pierre de renchérir : « Ne rendez-point mal pour mal, injure pour injure, bénissez au contraire car c’est à cela que vous avez été appelés, afin d’hériter la bénédiction[ 1Pierre 3, 9] ».
Vous entendez? Nous chrétiens, nous pécheurs, nous sommes appelés à bénir, c’est notre vocation. Nous cherchons du sens à notre vie? À faire la volonté de Dieu ? Ecoutons Jésus, écoutons Pierre, bénissons.
Bâtir des empires, construire des ponts, des avions, des maisons, faire des découvertes, de la politique, de la musique, son jardin que sais-je, c’est utile mais aux yeux de Dieu ce n’est pas essentiel. Ce qui l’est c’est que nous bénissions! Et qui bénit a l’assurance de recevoir et de faire pleuvoir sur l’autre la bénédiction divine et d’être trouvé juste aux yeux de Dieu et d’hériter la vie éternelle.
C’est pour cela que Jésus nous demande de nous réconcilier avec notre frère avant de présenter notre offrande à l’autel. Car se présenter à l’autel c’est se présenter devant Dieu dans la prière et au jour de la mort dans la tunique tissée de nos actions en ce monde.
En d’autres termes il nous dit qu’aucune de nos prières, qu’aucune de nos bonnes actions ne touche le cœur de Dieu si nous gardons un quelconque ressentiment dans notre propre cœur.
Pierre nous demande d’être « pleins d’amour fraternel, de compassion, et d’humilité[ 1Pierre 3, 8] ». C’est l’attitude fondamentale du priant qui s’agenouille devant Dieu et devant son frère.
En pratique avant de prier échauffons notre cœur en nous efforçant de ressentir intérieurement de l’amour pour les personnes que nous connaissons et en particulier pour celles que nous n’aimons pas ou qui nous font du mal, pardonnons leur, ressentons de la compassion pour ceux qui sont malades et qui souffrent, cultivons le sentiment d’abaissement et d’humilité, de petitesse et d’inexistence devant la grandeur de Dieu et ensuite offrons-nous tout entier dans notre prière suppliante ou de louange vers le Seigneur.
Car l’offrande agréable à Dieu c’est la paix que nous apportons dans notre relation à l’autre et c’est l’amour que nous portons à nos frères. Au jour du jugement la seule question qui nous sera posée sera peut-être : “As-tu aimé?” Et nous savons qu’il nous sera beaucoup pardonné si nous avons beaucoup aimé!
A lui l’incarnation de l’amour infini du Père soit l’honneur, la puissance et la gloire aux siècles des siècles! Amen!
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