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27 juillet 2018 5 27 /07 /juillet /2018 22:55
Musée du Louvre, Dist. RMN-Grand Palais / Martine Beck-Coppola

Musée du Louvre, Dist. RMN-Grand Palais / Martine Beck-Coppola

Quelques années avant l’an mil, un artiste anonyme réalisa cette plaque d’ivoire où figure une scène de l’Évangile rarement représentée au Moyen Âge : le Christ présentant un enfant comme modèle à ses disciples.

Saint Pierre, reconnaissable à ses clés, est au premier rang et le groupe des disciples fait bloc derrière lui.

Dans une foule aussi compacte, pas de place pour un enfant. On se serre, on pose le menton sur l’épaule du voisin : chacun cherche à être le mieux placé.

Coincé entre le cadre et l’épaule de son voisin, on aperçoit le visage de l’un d’eux qui essaie péniblement de se frayer un chemin.

Rechercher la première place, n’est-ce pas là une logique bien humaine ? Une discussion venait justement de s’élever entre les disciples, nous dit l’Évangile, « pour savoir qui était le plus grand parmi eux » (Lc 9, 46).

A propos, dans cette image, qui est le plus grand ? Le Christ, bien sûr, car dans les codes de représentation de cette époque, l’échelle de représentation d’un personnage permet d’en mesurer l’importance.

Et dans ce cadre étroit, on perçoit facilement que si Jésus se tenait droit, il dominerait d’une tête tous les autres.

Pour autant, le Christ ne profite pas de sa taille. Pour répondre à la question de ses disciples, au contraire, il se penche (sa tête est inclinée à 90 degrés).

Il le fait pour accueillir le petit enfant qui occupe l’espace central et qui, d’un pas encore hésitant, s’avance vers lui. Jésus le présente comme modèle à ses disciples : « Celui qui se fera petit comme cet enfant, c’est celui-là qui est le plus grand dans le Royaume des cieux » (Mt 18, 4).

Aux regards étonnés – voire contrariés – des Apôtres, on comprend que la réponse de Jésus, comme souvent, les décontenance.

Se soumettant quand même à la volonté de son maître, Pierre dirige l’enfant qui tend sa main vers celle du Christ.

En 968, l’abbaye Saint-Maurice de Magdebourg en Allemagne fut érigée en archevêché.

À cette occasion l’empereur Otton Ier fit cadeau au monastère d’un précieux meuble liturgique (un devant d’autel ou un trône épiscopal) orné d’au moins seize plaques d’ivoire.

Celle qui est présentée ici faisait partie de cet ensemble. Elle témoigne du haut niveau artistique des ateliers de la cour impériale à cette époque.

Avec talent et humour, l’artiste anonyme joue avec les éléments de l’image pour nous faire vivre le récit. Il profite, par exemple, du petit espace créé entre le cadre et le haut du dos du Christ pour faire apparaître deux visages de disciples aux yeux éberlués.

Comme arrière-plan de l’image, il utilise un fond de croix ajourées.

Mais plutôt qu’un élément de décor, il en fait un élément essentiel de sa composition mis au service du récit.

Au centre, les croix soulignent particulièrement l’axe vertical sur lequel se trouve l’enfant : elles forment comme une échelle qui lui ouvre le chemin vers le ciel.

Les croix assurent encore une autre fonction dans l’image : elles créent pour l’œil des repères horizontaux qui nous permettent de remarquer plus facilement les différences de taille entre l’enfant, le Christ et les disciples.

Une façon pour l’artiste de nous placer au cœur du sujet et de répondre à sa façon à la question : « Qui est le plus grand ? »

Dominique Pierre

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