Maurice Bellet, prêtre, théologien et psychanalyste, pour son son livre Dieu, personne ne l'a jamais vu (ed. Albin Michel).
Qu’est-ce que Dieu ? ou plus modestement qu’est-ce que n’est pas Dieu ou que n’est-il pas ?
Pierre-Luc Séguillon qualifie l’ouvrage “d’essai TGV, Théologie à Grande Vitesse”.
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En ce début de XXIe siècle, la question de la laïcité et de l’utilisation de Dieu par les responsables politiques continue à occuper le débat public. Au début du siècle précédent, Charles Péguy écrivait à propos des sectarismes qu’engendre trop souvent le rapport à Dieu.
« Nous naviguons constamment entre deux curés, nous manœuvrons entre deux bandes de curés ; les curés laïques et les curés ecclésiastiques ; les curés cléricaux anticléricaux, et les curés cléricaux ; les curés laïques qui nient l’éternel du temporel (…) et les curés ecclésiastiques qui nient le temporel de l’éternel »1.
Et il est vrai que le bavardage médiatique à propos de Dieu se nourrit trop souvent d’oppositions factices qui ont en commun de parler de certitudes cléricales là où il s’agit d’abord d’une aventure personnelle. C’est pourquoi les mystiques éclairent davantage la quête spirituelle que les gestionnaires de dogmes. Pour Jean de la Croix, le chercheur de Dieu « goûte un je ne sais quoi qui se trouve d’aventure »2.
Le dernier ouvrage que vient de publier Maurice Bellet intitulé : Dieu, personne ne l’a jamais vu, expose ce qu’il en est de Dieu lorsque, au lieu d’en faire le drapeau de cléricalismes contraires, on se risque sur les chemins inconnus. « Ce qui s’annonce alors, écrit Bellet, c’est que nous ne savons pas ce que nous allons trouver à propos de Dieu »3.
En effet, la quête de Dieu passe par le long combat contre les idoles qui prennent la place de Celui qui ne cesse de venir à l’homme comme une inexprimable nouveauté. Et, en matière d’idolâtrie, les esprits religieux et les rationalistes purs et durs sont finalement exposés aux mêmes risques.
Comme le dit encore Maurice Bellet : « Le croyant croit qu’il sait ; l’athée aussi : pour nier, il faut savoir ce qu’on nie. Là-dessus, l’athée et le croyant sont frères »4. Et chacun doit prendre le risque d’un chemin hors de ses croyances : « Celui qui part du Dieu auquel il croit a grande chance de le perdre, jusqu’à éprouver la non-foi – pour que la relation soit pure. Et celui qui part de l’absence ou de la négation de Dieu peut voir s’annoncer, dans son travail sans concession pour s’établir en l’homme, le don venant vers lui de l’Imprenable »5.
C’est pourquoi, la vraie fraternité entre les hommes ne passe pas dans la chaleur de certitudes partagées dont usent et abusent tous les cléricalismes, religieux ou athées, dont parle Péguy. Elle se vit avec ceux qui sont en marche pour découvrir ce qu’ils croyaient savoir et que finalement ils ne savaient pas.
« Le mouvement de l’opposition entre Dieu et non-Dieu, écrit Bellet, commençait entre croyance aveugle et incroyance prétentieuse. Il va vers une étrange limite où affirmation et négation tendent à se joindre : dire qu’il est – ou qu’il n’est pas -, c’est effacer toute prétention à le saisir » 6. Alors s’ouvre un espace où se défait tout sectarisme au cœur de la relation entre les hommes. « Chaque humain, écrit Bellet, est pour tout humain l’infini, et non ce qu’il peut saisir, par savoir ou pouvoir, y compris sous prétexte du bien ou de la vérité »7.
Le livre se clôt par ce verset de l’évangéliste Jean qui donne le sens profond de tout l’ouvrage :
« Dieu, personne ne l’a jamais vu. Si nos nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous, en nous son amour est accompli. »8
Chronique de Bernard Ginisty
diffusée sur RCF Saône & Loire le 06.02..09
1 - Charles PÉGUY : Dialogue de l’histoire et de l’âme charnelle in Œuvres en prose complètes, Tome III, La Pléiade, Gallimard, 1992, page 668.
2 -Jean de la Croix : Poésies complètes. Traduction de Bernard Sesé. Éditions Obsidiane 1986, page 94.
3 - Maurice BELLET : Dieu, personne ne l’a jamais vu. Éditions Albin Michel 2008, page 21
4 - Id. page 28
5 - Id. page 70
6 - Id. page 73
7 - Id. page 77
8 - 1e Épître de Jean 4,12.
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