Qui est Jésus ?
«Qui dites-vous que je suis?[1]» demandera-t-il un jour à ses disciples.
Nous nous faisons tous une idée de Jésus forgée par ce que disent de lui ses actes et ses paroles et par deux mille ans de commentaires. Nous le connaissons au plus intime dans la prière et dans notre relation personnelle avec lui, dans un cœur à cœur amoureux, un être à être.
Nous le goutons dans tous les sens du mot. Nous ne pouvons le décrire avec des mots mais nous en avons l’expérience, nous savons qui il est, chacun à la mesure de notre amour, de l’intérieur, sans pour autant épuiser son mystère. C’est cette connaissance qui se révèle aux amants mais qui étrangement s’estompe et disparait quand l’amour s’en va.
Il nous est pourtant possible de découvrir qui est l’homme Jésus que l’on soit croyant ou non grâce à deux témoignages : celui de Jésus lui-même et celui des pharisiens et des hérodiens qui pour le piéger se sentent obligés de le décrire à leur corps défendant.
Imaginons la scène suivante : vous êtes devant votre télévision et vous regardez l’interview de Jésus un guide spirituel controversé et de certains de ses auditeurs. L’interviewer tend son micro vers Jésus et lui demande : Que pouvez-vous dire de vous-même ? Qu’est-ce qui vous caractérise ? Et Jésus de répondre : « Je suis doux et humble de cœur »[2].
Et vous, pharisiens et hérodiens qui l’écoutez et l’interrogez, que dites-vous de lui ? Et eux de convenir que « C’est un maître, qui enseigne les choses de Dieu et les devoirs de l’homme. C’est un homme vrai « alethes » en grec, véridique, en qui rien n’est caché, qui dit le vrai, qui connait les chemins conduisant à Dieu et qui les enseigne. C’est un homme libre que personne ne peut influencer qu’il soit riche, puissant ou savant. »[3]
Vous regardez votre écran songeur et vous ne pouvez vous empêcher de penser : Qui de ceux qui nous gouvernent, qui nous enseignent, qui nous guident ressemble à Jésus ? Qui est doux et humble de cœur, vrai dans ses paroles et ses discours, vrai dans ses actes, sans pensées et intentions cachées, libre de toute influence, de tout pouvoir, libre face à la mort, libre parce qu’il donnera sa vie pour témoigner de ce qu’il enseigne ? Il est unique ; un véritable ovni dans ce monde où règne le relativisme, la corruption, les faux-semblants et la confusion.
La caméra zoome sur le visage de Jésus. Son regard plonge dans nos yeux et il s’adresse au-delà de l’écran à nos pensées secrètes avec vigueur : « Pourquoi me tendez-vous un piège ?[4] Pourquoi ces doutes sur ma personne, sur mon enseignement ? Pourquoi ces constructions mentales artificielles pour trouver des raisons de refuser le vrai ? »
Il s’arrête de parler. Un silence. La caméra ne lâche pas ce regard qui nous fixe.
« Montrez-moi qui vous êtes et ce que vous faites. Quel est le sens de votre vie, de vos actes, de vos choix ? »
Il retourne sa question au journaliste et à chacun de nous :
« Qui êtes-vous ? Qu’est-ce qui vous fait être ? De qui êtes-vous l’image ? A qui ressemblez-vous ? (un silence) Si vous me ressembliez vous m’aimeriez. »
Nouveau silence. La caméra détaille ce visage en même temps plein de douceur, d’autorité et d’une légère tristesse. Il reprend la parole :
« Vous êtes ce que vous faites, vous ressemblez à ce que vous fréquentez, vous devenez et vous appartenez à qui ou à quoi vous attachez votre âme. A chacune de vos décisions vous choisissez la vie ou la mort, la liberté ou les chaines. »
Le journaliste interloqué et ébranlé s’insurge : « Mais de quoi parlez-vous ? Comment savoir ce qui donne la vie ou la mort ? Mon travail, ma famille à qui je donne l’essentiel de mon temps et ma façon de vivre en quoi sont-ils concernés ? Je prie, je vais à la messe, je fais du bien autour de moi. Cela ne suffit pas à Dieu ? Vos propos me déstabilisent. Ma vie est équilibrée, je me sens libre et bien dans ma peau. Pourquoi laisser entendre que cela serait une illusion qui conduit à la mort ? »
Jésus sourit et se met à le tutoyer : « Regarde bien en profondeur ce qui dirige ta vie. Tu te crois libre mais tes actes sont souvent la conséquence de tes passions intérieures. Regarde ce que tu sacrifies pour un scoop. Ce qui donne la vie ou la mort dans tes actes et tes choix c’est l’intention fondamentale qui les sous-tend. Ce que tu fais le fais-tu pour toi, pour le monde ou pour Dieu ? Par ta propre volonté ou avec Dieu ?
Pour savoir ce qu’il en est rends au monde ce qui est au monde et à Dieu ce qui est à Dieu. Tu es fait à l’image de Dieu, tu es marqué de son sceau, tu lui appartiens et tu ne peux rien donner à Dieu que toi-même.
Te donner à Dieu c’est l’aimer, lui rendre un culte, le louer et l’adorer, le bénir et diriger ta vie guidé par l’éthique divine, par la loi de Dieu inscrite dans ton cœur. Ce que tu donnes à Dieu, Dieu le multiplie et te le rend au centuple. Ce que tu donnes à Dieu en ce monde devient un trésor dans le ciel. Tu donnes ta vie humaine et tu récoltes la vie éternelle.
Rends au monde ce que tu lui dois pour devenir libre. Rends à la société, à la famille, à la terre, à l’humanité ce que tu leur dois par ton travail, ton amour et tes attentions mais ne fais pas d’eux tes dieux.
Il n’y a qu’un seul Dieu qui est et qui donne la vie et JE SUIS sa bonne nouvelle.
Traite les affaires du monde avec les lois du monde tant qu’elles ne sont pas contraires aux lois de Dieu. Discerne ce qui plait à Dieu et ce qui t’éloigne de lui. Faire sa volonté c’est voir le monde avec ses yeux, c’est agir inspiré par son Esprit, par ses anges ou ses messagers humains. Sache qu’en Dieu seul tu es libre de toute influence mauvaise et mortifère. »
Le journaliste un peu abasourdi s’apprête à rendre l’antenne quand Jésus l’interpelle à nouveau :
« Tu m’as demandé tout à l’heure qu’est-ce Dieu pourrait vouloir de plus qu’une vie équilibrée entre les devoirs dus au monde et à Dieu ?
Désolé de te décevoir mais Dieu n’aime pas ce qui est équilibré, ce qui résulte d’un compromis qui le relativise. Dieu est tout sauf un être équilibré ! Sa sagesse est folie pour l’homme. Il est un feu dévorant qui nous veut tout à lui. Rare sont ceux qui peuvent répondre à cet amour inconditionnel et jaloux mais tous doivent connaître cette vérité et essayer d’y répondre à la mesure de leur faiblesse.
Quand je dis « Rends à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu »[5] je ne fais pas un partage équilibré entre les choses du monde et celles de Dieu, je dis au fond « si tu le peux, si tu en as reçu la grâce, débarrasse-toi du monde et donne-toi totalement à Dieu. »
C’est ce qu’a fait un de mes disciples, Saint François avec son père en lui disant devant les habitants d’Assise et leur évêque : « En toute liberté désormais, je pourrai dire: Notre Père, qui êtes aux cieux! Pierre Bernardone que voici n’est plus mon père, et je lui rends non seulement son argent que voici, mais encore tous mes vêtements. J’irai nu à la rencontre du Seigneur. » … « C’est à lui que j’ai confié mon trésor et ma foi » »
A Lui le maître doux et humble de cœur soit l’Honneur, la Puissance et la Gloire aux siècles des siècles. Amen.
Commentaire de Marc-Elie de la péricope Matthieu 22, 15-21
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