Gorze, décembre 2018
Et Il dit : « Je ferai passer devant toi toute ma beauté. »
Exode 33 :19
Chers amis,
Parmi les moyens spirituels qui nous sont proposés sur notre chemin de vie, on peut trouver deux éléments qu'il est bon d'intégrer dans notre pratique : d'une part la beauté, qui est positive et miséricordieuse, et d'autre part l'ascèse qui est négative et exigeante. On pressent cependant que l'une contient quelque chose de l'autre car toutes deux dérivent de la vérité et l'expriment sous des angles différents.
Dans la méditation, l'élément de beauté est évident puisque l'on parle de la « belle posture ». Celle-ci reflète ou devrait refléter la dignité et la droiture, inscrites dans la verticalité vécue et assumée à partir du centre cosmique de l'homme qu'est le centre vital ou « Hara ».
Dans la liturgie cet élément « éclate aux yeux, aux oreilles et au nez », si je puis dire, sans qu'il soit besoin d'insister.
Le juste discernement des formes a une valeur toute particulière ; d'où l'importance de la « mise en forme ». Toutes les « malformations esthétiques » qui nous entourent et dans lesquelles nous vivons risquent d'empoisonner notre sensibilité. L'esthétique vraie n'est autre que la science des formes, qu'elles soient visuelles ou auditives. Forme et éveil : tout l'art traditionnel se fonde sur cette correspondance. La justesse des proportions, du geste, de la voix est un critère de vérité qui apparaît de manière fulgurante et va droit au cœur.
Dieu s'incarne dans une forme qui respecte la loi de la création et qui donc est belle : « le beau berger. » ...
La beauté, comme ascèse au quotidien, est un miroir toujours présent de bonheur et de vérité. Cette beauté est souvent liée à la simplicité. L'élément bonheur est lié à la « saveur » rythmique et géométrique de la forme juste « qui engendre l'homme à lui-même » pour reprendre une expression de maître Dögen fondateur du sôtô zen.
C'est une sorte d'illumination : l'essence se montre comme apparence et l'apparence communique l'essence. La beauté est incomparable ! Il n'y a pas de beauté qui soit plus belle qu'une autre beauté : chaque icône est belle d'une beauté unique. Dans la beauté l'homme pressent ce à quoi il aspire ; il réalise l'importance d'un chemin de transformation qu'on pourrait appeler « chemin vers la beauté ».
Le « malin », que le Christ appelle « le prince de ce monde », se manifeste, de la façon la plus extérieure sans doute, mais aussi la plus immédiatement tangible et la plus envahissante, dans la laideur des formes. La beauté nous élève, la laideur nous alourdit et nous plombe. La beauté extériorise à sa manière la Vérité et la Béatitude.
L'état contemplatif dont on parle souvent dans les traditions spirituelles n'est autre que la capacité de voir ou d'entendre la beauté en y percevant quelque chose de Dieu. Ce contenu divin permet au disciple de se « détacher » d'autant plus facilement des apparences et en particulier du piège de l'égo qui exprime bien souvent une « grimace » de notre véritable nature. L'ascèse de « la seule chose nécessaire » nous invite à retrouver le goût du beau (Philocalie) en vue de l'éveil du cœur.
Ajoutons que la vérité de la beauté s'impose en principe à tous les hommes et c'est ce qui en fait un élément central de la métanoïa.
En ce temps de préparation vers Noël, souvenons-nous que la beauté parfaite, dans les limites de son incarnation, vient nous visiter pour que nous puissions « sortir de nos ténèbres » et retrouver le chemin vers la lumière qui révèlera la « splendeur du vrai » à l'homme assoiffé de « justesse » ...
« Tes yeux verront le Roi dans sa beauté, ils contempleront le pays dans toute son étendue. » Isaïe 33;17
Je vous dis toute mon amitié en Christ, à bientôt !
Père Francis
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