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2 juillet 2019 2 02 /07 /juillet /2019 22:59
L’invitation à l’amour

Isaïe 25, 6 à 9 - 1Jean 3, 13 à 18 - Luc 14, 16 à 24

Chaque dimanche l’Église nous propose trois lectures : une tirée de l’ancien testament, une extraite d’une épitre et une péricope d’un Evangile.

Nous pouvons sans vraiment prendre le risque de nous tromper penser que nos Pères ne les ont pas mises ensembles par hasard.

L’Esprit qui les a inspirés - ce qui est une tautologie puisque l’étymologie du mot inspiration est « mettre un souffle, un esprit dans quelqu’un » - l’Esprit donc, nous donne dans ce regroupement de paroles une clé de compréhension du texte de l’Évangile.

Que pouvons-nous alors retenir des paroles d’Isaïe et de Jean qui nous sont proposées aujourd’hui et qui éclairera ainsi un des sens de la parabole des invités au festin du roi ?

Isaïe prophétise la venue du royaume sous le symbole d’un festin messianique préparé pour toute l’humanité, « pour tous les peuples »[1].

Et il nous dit : Dieu ôtera le voile du deuil et les larmes de la face des hommes en faisant disparaître la mort. Le repas offert par Dieu annihile la mort.

Qui participe à ce repas, qui s’assied à la table divine ne mourra plus et tous les hommes sont invités à partager ce repas divin et salvateur.[2]

Isaïe annonce ainsi le dévoilement de ce qui était caché, c’est la révélation ultime, l’apocalypse de la fin des temps où l’humanité communiera, se nourrira des dons de la vie même de Dieu et ne connaîtra plus la mort.

Et Jean de préciser dans sa lettre : c’est l’amour qui tue la mort. C’est l’amour qui nourrit et qui donne la vie dans le royaume et le royaume est déjà là dans notre vie sur cette terre.

Si nous ne participons pas à l’amour nous sommes déjà morts. Car « qui n’aime pas demeure dans la mort »[3] dit Jean. Et l’amour dont il est question c’est celui dont Jésus nous aime jusqu’à en mourir ; c’est l’amour que nous devons à nos frères. Et si nous aimons nos frères, l’amour de Dieu demeure en nous et nous donne la vie éternelle.

Relisez le texte c’est ce qui est écrit explicitement[4]. Nous découvrons ainsi le pouvoir incroyable de l’amour : Si j’aime mon prochain alors j’ouvre mon cœur à l’amour de Dieu et son amour qui communique la vie divine demeure en moi.

C’est ce que dit Jésus ailleurs d’une autre façon « Si quelqu'un entend ma voix (c’est-à-dire celui qui entend mon commandement « aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ») et ouvre la porte, j'entrerai chez lui, je souperai avec lui, et lui avec moi. »[5]

Incidemment nous découvrons une vérité que nous connaissions intuitivement : tout homme chrétien ou non, croyant ou athée est sauvé et ouvre son cœur à l’amour de Dieu s’il a de l’amour pour son prochain. Ne nous inquiétons donc pas pour ceux qui ne connaissent pas Jésus, la loi d’amour dans leur cœur est leur viatique pour la vie éternelle.

Mais nous, savons-nous aimer ?

L’amour de Dieu est la nourriture du repas divin. L’amour de l’homme est sa réponse à l’invitation de prendre part à ce repas.

Tout homme est invité à l’amour : à aimer son prochain et à être aimé de Dieu. Refuser d’aimer c’est refuser l’invitation du roi, c’est choisir la mort car il n’y a pas d’autre nourriture vivifiante que l’amour de Dieu.

Prendre un repas en hébreu se dit littéralement « prendre le pain ». Manger à la table du Seigneur c’est manger le pain de vie, c’est manger le Dieu d’amour qui a fait de son corps et de son sang en Jésus le pain de vie.

Dans le paganisme les hommes donnent de la nourriture aux dieux, dans le christianisme c’est Dieu qui se donne en nourriture, c’est Dieu qui aime l’homme en premier.

Nous avons le désir de vie mais avons-nous le désir d’amour ? Le désir d’entrer en relation avec l’autre pour entrer en communion avec Dieu ?

Si nous avions le désir de Dieu nous aurions le désir de l’autre. Nous cherchons Dieu ? Et bien c’est dans la rencontre avec l’autre que nous trouvons Dieu.

Quand nous nous mettons au service de nos frères, quand nous partageons nos biens, notre temps avec l’affligé, l’angoissé, l’affamé, l’esseulé, le malade ; quand nous écoutons avec intérêt et patience celui ou celle qui nous parle, quand nous sommes simplement heureux de partager la présence de l’autre nous sommes vraiment assis à la table du Seigneur.  

Et à cette table c’est le Seigneur qui nous sert comme tout maître de maison servait ses convives dans les repas festifs de l’antiquité, comme Jésus servait ses disciples au repas de la sainte cène.

Dieu n’est pas dans les livres de théologie et les rituels, il est dans chaque personne que nous croisons sur notre chemin de vie. Il est dans notre cœur si notre cœur s’est brisé de compassion et de miséricorde pour nos semblables.

La parabole s’adresse à nous, chrétiens. A nous les invités du roi, les amis légitimes, les membres de son clan, de sa famille. Et elle nous dit : « vous avez le cœur froid et sec, vous refusez la plupart du temps l’invitation qui vous est faite. Votre désir de Dieu est remplacé par le désir des choses du monde. »

La parabole nous le rappelle, et nous le savons bien, que ce qui nous attire le plus dans le monde c’est ce qui nous éloigne de Dieu et de notre prochain. 

L’autre, que ce soit Dieu ou le prochain, est, avec ses besoins et ses désirs, un obstacle à mes propres besoins et à mes propres désirs. Sans la grâce de Dieu, sans son aide nous ne savons pas vraiment aimer ni Dieu ni notre prochain.

« Je suis effrayé, dit Soljenitsyne, par le manque de faim spirituelle de l’occident ».

Il n’y a de plénitude que de Dieu. Sans faim de Dieu comment Dieu pourrait-il nous combler ? « Ouvre grande la bouche, moi je l’emplirai » dit le Psaume[6]

C’est un fait : la bouche des repus de la consommation reste fermée à Dieu et à l’amour.

Ne nous affligeons pas sur le salut de l’âme des pauvres, des boiteux, des persécutés et des malheureux, ils sont déjà dans le cœur de Dieu qui leur donne la vie éternelle sans condition.

Voyez ! Le roi de la parabole ne les invite pas. Il va les faire chercher là où ils sont dans leur malheur et leur souffrance voire il va forcer à entrer dans la salle du banquet ceux qui se croient indigne d’un tel honneur. Car avoir le sens de son indignité vaut, face à Dieu, tous les repentirs du monde !

Inquiétons-nous plutôt de notre propre salut. Répondre à l’invitation du Seigneur est une ascèse quotidienne. Suivons le modèle de Saint François : apprenons et essayons d’aimer vraiment les personnes qui nous entourent et surtout celles pour lesquelles nous n’avons pas d’attirance.

Les aimer c’est les mettre au centre de nos attentions alors que notre nature nous porte à nous intéresser prioritairement à nous-mêmes, à ceux qui nous  apprécient, qui nous aiment ou dont nous pouvons tirer un bénéfice.

Demandons dans la prière au Seigneur de nous aider à aimer sans condition notre prochain quel qu’il soit car sans cette aide c’est presque impossible. Et si malgré tout nous n’arrivons pas à aimer demandons en pardon au Seigneur qui aimera à notre place ceux que nous ne savons pas aimer.

Le festin du roi est aussi la métaphore du repas eucharistique où nous sommes invités à communier au corps et au sang du Seigneur.

Cette communion ne peut être effective que si nous sommes en paix et dans l’amour avec nos frères et sœurs. Jésus nous dit ailleurs de nous réconcilier avant de monter à l’autel[7] car nous l’avons vu il n’y a pas de communion avec Dieu sans communion d’amour avec notre prochain.

Partager le repas est un acte sacré, un sceau qui celle le lien de confiance, d’intimité et de fidélité entre celui qui invite et celui qui est invité. C’est un gage de paix et de bénédiction. Seuls les membres de la famille, les alliés, les amis mangent à la table du roi. Ils reconnaissent et acceptent sa souveraineté et en retour il les nourrit et il les protège. Il est le berger, ils sont les brebis.

C’est pourquoi qui trahit celui avec qui il a partagé le pain et le vin commet un grave péché. C’est la rupture du lien sacré de l’amitié, la déchirure du manteau de l’amour inconditionnel.

Cela a été le péché de Judas. C’est aussi notre péché quand, après avoir communié nous oublions si souvent à la moindre contrariété le commandement de nous aimer les uns les autres.  Nous trahissons encore et toujours l’amour et nous perdons la grâce de l’Esprit.

Ayons-en conscience, repentons-nous et demandons autant de fois qu’il le faut par une prière l’aide divine :

« Seigneur Jésus, tu as été parmi nous celui qui sert et tu as lavé les pieds à tes disciples assis à table. Donne-nous l’esprit d’attention et de sollicitude fraternelle : alors nous serons tes disciples et nous te sentirons présent à notre côté. Tu es le Christ, notre seul Seigneur. »

A Lui soit la Gloire, l’Honneur la Puissance et l’Adoration aux siècles des siècles. Amen !

Marc-Elie


[1] Isaïe 25, 6

[2] Isaïe 25, 7 et 8

[3] 1 Jean 3, 14

[4] 1 Jean 3, 15 à 17

[5] Apocalypse 3, 20

[6] Psaume 80, 11

[7] Matthieu 5, 20 à 26

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