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22 avril 2020 3 22 /04 /avril /2020 22:56

 

Père Alphonse, hommage

 

Il n’était pas d’emblée sympathique, je l’ai pourtant admiré jusque dans sa faiblesse. Il m’impressionnait : par sa foi, elle le faisait irradier cette lumière incréée, que nul n’approche vraiment mais qui l’avait visité, sa culture spirituelle et sa mémoire prodigieuses, sa rigueur et par les rencontres hors du commun qui l’avaient fait grandir et devenir lui-même.

 

J’aimais jusqu’à la légère pointe d’accent allemand qui lui restait encore de son enfance en Alsace-Lorraine. Rien ne manquait apparemment à ce rebelle hors normes, fou de Jésus, de sa mère et de la sainte Trinité. Il avait une présence qui en imposait, pour le meilleur comme pour le pire, un verbe qu’il avait abouché à celui de Dieu, mon starets à moi, à nous tous.

 

Aujourd’hui qu’il meurt à cette vie terrestre, à quelle ancre m’accrocher ? Qu’est-ce qui demeure de lui ? Qu’est-ce qui de lui ne mourra pas ? Le diamant pur, taillé par les siècles et les saints, la prière de Jésus qu’il m’a transmise et qui, à elle seule « justifierait » sa paternité envers moi. La prière en intraveineuse, cellulaire, le bouche à bouche, le sang versé du Christ dans le mien. Un seul corps et un seul sang. Il m’a offert la prière du coeur que personne au monde ne pourra m’ôter.

 

Je veux croire que même si je m’éloignais de Dieu, même si je le reniais, je serais capable de me réveiller en pleine nuit en train de poser cette prière sur les battements de mon cœur ; mécaniquement, surnaturellement, miséricordieusement. Quand elle est entrée en soi, on peut l’oublier, mais ses vagues, pour invisibles qu’elles soient, continuent leur ballet ; elle croît avec nous, parfois sans nous.

 

Une fois qu’elle est entrée, qui la déloge ? Une fois greffée au souffle, nul homme, pas même un ange, ne peut plus la ravir. Il est parti et il ne dépend que de moi qu’il me reste tout. Pratiquer.

 

C’est la fin d’un homme de Dieu à la parole de feu, d’un homme de contrastes, de coups de force contre les institutions, d’un malade grabataire durant quatre ans qui ne s’est jamais plaint, d’un père spirituel exigeant, à l’extrême ; c’est la fin du monde où il m’accompagnait, celui du nouveau, de l’élan vers le meilleur de soi, de l’enthousiasme de la pratique, d’une foi vivante, à nourrir sans cesse, impitoyable avec soi. Avec lui, le nouveau durait, durait… Et il durera parce que c’est le Verbe qui l’animait que j’aimais et qu’Il demeure.

 

Il meurt au monde visible et me laisse sur le versant ingrat, abrupt de la voie, il me laisse réaliser la plus réaliste des ascensions : tenir dans la foi. Il m’a donné pour y prétendre les outils de la voie, la méditation, la prière, le jeûne, l’émerveillement, la bénédiction, l’attention aux autres, la joie. A moi de les semer, de les cueillir, d’en user, abuser, à moi d’en témoigner.

 

J’embrasse une dernière fois ta main, comme j’aimais à le faire avec celle de mon grand-père.

 

Anne Ducrocq

 

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