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27 mai 2020 3 27 /05 /mai /2020 22:55

Dans son ouvrage Le Dialogue, Catherine de Sienne développe un traité de christologie à travers ce qui est appelé la "doctrine du pont". Ce traité se veut une démonstration de la place centrale du Christ dans le rôle de médiateur entre l'homme et Dieu, à travers le libre arbitre.

Le pont qui permet de traverser le fleuve (où tout monde se noie) est le Christ, avec trois marches.

Ces trois marches représentent les trois étapes de la vie chrétienne, mais aussi les principales plaies du Christ en croix : les pieds sont les premières marches du pont, mais ils représentent le désir de Dieu qui conduit l'âme à vouloir connaître et mieux aimer Dieu.

La deuxième marche du pont est le cœur du Christ, lieu de l'union à Dieu et de la connaissance de soi et de Dieu.

La dernière marche est la bouche du Christ, symbole de l'union à Dieu et de la paix intérieure.

Le pont n'est accessible qu'à travers la connaissance de soi, la pratique des vertus, mais aussi la miséricorde de Dieu.

La pratique de la connaissance de soi et des vertus est le seul moyen de passer le pont. Ceux qui ne suivent pas cette voie sont alors emportés par les flots des divers désirs désordonnés (avarice, concupiscence charnelle, orgueil, injustice, peur, mensonge qui conduisent à l'enfer).

L'homme étant libre et à l'image de Dieu, c'est par sa volonté et le désir de Dieu que l'homme peut Le choisir ou non en succombant aux tentations :

"Personne ne peut avoir peur d'aucune bataille, d'aucun assaut du démon, parce que j'ai fait de tous des forts.

Je leur ai donné une volonté intrépide, en trempant dans le sang de mon Fils.

Cette volonté, ni démon, ni aucune puissance créée ne peut l'ébranler.

Elle est à vous, uniquement à vous, c'est Moi qui vous l'ai donnée avec le libre arbitre.

C'est donc à vous qu'il appartient d'en disposer, par votre libre arbitre, et de la retenir ou de lui lâcher la bride suivant ce qu'il vous plait.

La volonté, voilà l'arme que vous livrez vous même aux mains du démon : elle est vraiment le couteau avec lequel il vous frappe, avec lequel il vous tue.

Mais si l'homme ne livre pas au démon ce glaive de la volonté, je veux dire s'il ne consent pas aux tentations, à ses provocations, jamais aucune tentation ne pourra le blesser et le rendre coupable de péché : elle le fortifiera au contraire lui faisant comprendre que c'est par amour que je vous laisse tenter, pour vous faire aimer et pratiquer la vertu." (Extrait du livre Le Dialogue, chapitre XIII.)

En des termes dévastateurs applicables à la peur qui a envahi le monde, Catherine écrit à un cardinal légat, Pierre d'Estaing, en 1372 :

"Une âme pleine de peur servile ne peut rien réaliser de bon, quelles que soient les circonstances, qu'il s'agisse de petites ou de grandes choses.

Elle sera toujours naufragée et ne terminera jamais ce qu'elle a commencé.

Oh, que cette peur est dangereuse! Cela rend le désir saint impuissant, cela aveugle un homme afin qu'il ne puisse ni voir ni comprendre la vérité.

Cette peur est née de l'aveuglement de l'amour-propre, car dès qu'un être humain s'aime avec l'amour-propre des sens, il apprend la peur, et la raison de cette peur est qu'il a donné son espoir et son amour à la fragilité des choses qui n'ont ni substance ni être et qui disparaissent comme le vent…

Ne cherchez rien d'autre que l'honneur de Dieu, le salut de l'âme et le service de l'épouse bien-aimée du Christ, la Sainte Église."

(Sigrid Undset, Catherine Of Siena, published by sheed & Ward 1954, pp. 139–140.)

 

Notre libre arbitre doit toujours réaliser la Divine Volonté en toutes choses.

Nous voyons alors différemment ce qui nous arrive de bien comme ce qui nous arrive de mal, le fait de devoir parler de Dieu, par exemple annoncer Sa parole à des personnes qui n'y sont pas habituées, ou non, ce qui nous importe devient de réaliser la Divine volonté, vouloir ce que Dieu veut.

Que ta Volonté soit faite sur la terre comme au ciel. On commence par faire Sa volonté sur la terre pour que son Règne au Ciel vienne sur la terre. C'est la voie de l'union à Dieu.

Cette connaissance spirituelle est bien plus réaliste et concrète que n'importe quelle expérience sensible. C'est notre meilleure arme contre la peur.

Dans nos peurs, un bon moyen de chasser les peurs (comme les autres tentations), est de contempler les pieds du Christ sur la Croix.

Les pieds sont les premières marches du pont, ils représentent le désir de Dieu qui conduit l'âme à vouloir connaître et mieux aimer Dieu, ils représentent aussi notre libre arbitre, le commencement de notre marche vers le Seigneur.

Cette doctrine du pont et des trois marches, dont la première consiste à embrasser les pieds du Christ, est le "remède aux petites tentations", comme la peur.

"Ne cherchez pas à vouloir opposer la vertu contraire à la tentation que vous éprouvez, car ce serait encore discuter avec elle.

Dirigez plutôt votre coeur vers Jésus-Christ, et dans un élan d'amour embrassez ses pieds sacrés.

C'est le meilleur moyen de vaincre l'ennemi, aussi bien dans les grandes que dans les petites tentations."

(Saint François de Sales, Introduction à la vie dévote, Spiritualité Lexio, Les éditions du Cerf, Paris 2019, pp. 419-420.)

 

Saint Ignace de Loyola est reconnu pour son discernement des esprits, mais nous pouvons trouver dans ses œuvres une vive anticipation des mêmes principes. Jésus lui dit à un moment donné : "Mes visions sont toujours accompagnées dans un premier temps d'une certaine peur, mais au fur et à mesure qu'elles se déploient, elles apportent un sentiment croissant de sécurité.

D'abord vient l'amertume, mais plus tard vient la force et la consolation.

Les visions qui viennent du diable créent d'abord un sentiment de sécurité et de douceur, mais elles se terminent par la terreur et l'amertume. 

Ma voie est la voie de la pénitence. Au début, cela semble difficile et difficile à suivre, mais plus vous la poursuivez, plus elle apparaît heureuse et douce. 

La voie du diable, en revanche, est douce et heureuse au départ, mais à mesure que l'âme poursuit la voie du péché, elle passe de l'amertume à l'amertume, et la fin est la damnation éternelle."

Sigrid Undset , femme de lettres et romancière norvégienne, "Catherine of Siena, published by Sheed & Ward 1954, p. 44

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