Les chrétiens d'occident et d'orient ne fêtent pas toujours la résurrection du Christ, Pâques, à la même date. C'est pourtant l'élément fondateur de notre croyance : la révélation d'une promesse en une vie éternelle que nous annonce Dieu incarné sur terre.
Il est surprenant que cette date aussi importante diffère dans les 2 hémisphères du monde, et encore plus surprenant dans le monde occidental dans lequel ces 2 dates qui se vivent en décalé pour une même célébration génèrent de fortes incompréhension.
On peut imaginer que le futur, proche ou lointain, verra la décision d'une date commune, mais aujourd'hui le poids des traditions, la peur de l'église du changement en relation avec une méconnaissance de la part des fidèles qui leur ferait rejeter ce changement, font que cela n'est pas à l'ordre du jour.
Une approche différente dans la croyance en est également une raison, l'occident portant un poids important sur la vérité scientifique, là ou l'orient porte un poids important sur l'immuabilité et le respect de la tradition.
Alors essayons de comprendre à partir de 2 analyses l'une écrite et l'autre télévisée:
- Analyse proposée par Vladimir Golovanow (référence : Vladimir Golovanow, page facebook du 26 mars 2021) :
"L'un des objectifs du Concile de 325 fut de régler les controverses pascales qui, dès le IIe siècle, se cristallisent autour de la date de Pâques, et empoisonnent la vie de l’Eglise.
A cette date, deux observances pascales s’opposent : l’une, suivie par toute l’Asie proconsulaire, célèbre la fête chrétienne de Pâques le même jour que l’échéance de la fête juive, le soir du 14e jour du mois de nisan, d’où son nom d’observance quartodécimane. Le célèbre évêque de Smyrne et martyr saint Polycarpe suivait cette pratique.
L’autre, se basant sur le fait que le Sauveur est ressuscité un dimanche, exige que la fête de Pâques soit célébrée le dimanche qui suit le 14 nisan : c’est l’usage qui prévaut à Rome, tel qu’il est attesté sous le règne du pape Xyste, au premier quart du IIe siècle.
Peu à peu les choses s’enveniment, et Rome voit d’un œil de moins en moins favorable ceux qu’elle nomme les Quartodécimans, car la controverse pascale n’accuse pas seulement une divergence sur la date de la fête, mais aussi une différence en ce qui concerne le jeûne préparatoire à Pâques.
Dans le courant du IIIe siècle, dans le monde latin, des cycles pascals sont calculés afin de prévoir la date de Pâques plusieurs années à l’avance : ils reposent sur le calendrier solaire, et non lunaire, afin de se démarquer davantage du peuple juif dont le calendrier fait intervenir les cycles de la lune. Les écarts de date n’en deviennent que plus grands.
L’usage se répand ainsi à Rome de célébrer Pâques le dimanche après la pleine lune qui suit l’équinoxe de printemps : dès lors, Pâques tombe au plus tôt le 22 mars, et au plus tard le 25 avril.
En 314, au concile d’Arles, il est statué que tous les chrétiens devront célébrer la fête de Pâques le même jour, et que le pape, par une circulaire, en annoncerait la date chaque année.
Quelques années plus tard, le concile de Nicée répudie la manière en cours en orient de fixer Pâques « selon la coutume des Juifs », et fixe que tous les chrétiens devront suivre l’usage pascal auquel se conforment « la ville de Rome, l’Italie, et l’Afrique entière, les Espagnes, les Gaules, les Bretagnes, toute la Libye, la Grèce, le diocèse d’Asie, celui du Pont et de la Cilicie ».
Il faudra encore deux siècles pour que les dispositions du concile de Nicée soient acceptées par tous, et qu’on se mette d’accord sur la façon de calculer : par exemple, la fixation de la date de l’équinoxe, qui diffère alors entre Rome et Alexandrie…
Avec l’adoption du calendrier grégorien en occident à la fin du XVIe siècle, qui vise à recaler le calendrier julien qui a dérivé astronomiquement après plusieurs siècles, le problème rebondit, car les Latins et les Grecs n'utilisent plus le même calendrier et ne célèbrent plus la fête de Pâques à la même date.
La conférence panorthodoxe convoquée par le patriarche de Constantinople en 1923 proposa un "NOUVEAU CALENDRIER" (appelé aussi calendrier julien réformé ou calendrier grec…), amalgame entre un calendrier grégorien "amélioré" pour les fêtes fixes (il supprimera 1 jour en 2800 qui ne sera pas une année bissextile contrairement au calendrier grégorien classique…) et le comput Alexandrin pour ce qui concerne Pâques et les fêtes mobiles. Si ce calendrier est suivi par la majorité des Églises orthodoxes... il refusé par une grande partie des fidèles puisque les Églises de Jérusalem, Russie, Serbie et Géorgie ainsi que les monastères du mont Athos ne le suivent pas.
L'église russe quant à elle ne participa pas à cette conférence mais le saint patriarche Tikhon tenta d'instaurer ce Nouveau Calendrier et fut obligé de reculer devant le refus de la majorité des croyants. Des schismes "Vétéro-calendaristes" se produisirent dans les Églises des Balkans qui l'instaurèrent (Grèce, Bulgarie, Roumanie…). Aujourd'hui la diaspora orthodoxe est divisée, des paroisses orthodoxes voisines célébrant selon des calendriers différents…
Le débat rebondit dans le cadre du processus préconciliaire. Le document proposé à la commission préparatoire en 1982 énonçait: "actuellement, selon l’opinion des savants astronomes, le nouveau calendrier est plus juste que l’ancien. Il en résulte que le meilleur moyen de résoudre la question du calendrier et de la pascalie est la reconnaissance par toutes les Églises orthodoxes du nouveau calendrier, tant en ce qui concerne les fêtes fixes que pour la pascalie…" .
Mais les délégués des Églises russe, serbe et de Jérusalem s'y opposèrent en arguant de difficultés pastorales et le document finalement adopté, se limitait à constater que «actuellement, le passage de toutes les Églises locales au calendrier julien rectifié s’avère impossible». Le patriarche de Moscou Cyrille ferma le débat fin 2015 en déclarant: "Le thème «de la fixation d’une date de Pâques plus exacte» n’est absolument pas d’actualité pour l’Église orthodoxe et ne peut que semer le trouble parmi de nombreux fidèles".
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