Un ami m’a offert le catalogue Cayeux. « Juillet approche, il est temps de commander de nouveaux iris pour les installer au jardin », m’a-t-il dit, pour que je consulte cette bible sans tarder. J’avais mille choses à faire mais je suis restée là, à rêver des heures devant ces pages pleines de fleurs en robe de bal.
Des bleus et des pourpres, des blancs et des violets, panachés roses et mauves. Elles m’ont rappelé mon émotion, à Bagatelle, dans le jardin aux iris clos de buis taillés – jardin où je m’attends toujours à voir surgir une infante d’Espagne.
Les iris ont aussi ramené le souvenir de Jean-Baptiste de Vilmorin, dans son jardin de Verrières-le-Buisson où Louise repose sous un banc en guise de pierre tombale, et près d’un cerisier.
Jean-Baptiste de Vilmorin, qui dirigeait la Société nationale de protection de la nature, venait de publier une histoire des plantes, intitulée Le Jardin des hommes.
La journée était délicieuse dans cet arboretum créé par son aïeul, une sorte de zoo botanique où des arbres du monde entier s’étaient acclimatés au ciel de France.
Le botaniste avait évoqué quelques-unes des savoureuses histoires de plantes qu’il avait retranscrites dans son livre : « Savez-vous que les iris sont les véritables symboles de la Royauté de France, et non les lys comme on le pense ? »
Il m’avait alors raconté l’origine de l’emblème et la source de cette confusion.
Clovis faisait la guerre à Alaric II, le roi des Wisigoths qu’il battit et exécuta au terme de la bataille de Vouillé, en 507.
Mais avant cet instant fatidique, le roi des Francs avait été mis en difficulté. Le voilà pourchassé avec ses troupes jusqu’aux bords de la Vienne. Or la rivière était en crue, et les chevaliers lourdement vêtus de cottes de mailles.
Il leur était impossible de traverser. C’est alors que Clovis aperçut une floraison d’iris jaunes au milieu du cours d’eau, qui indiquait ainsi la possibilité d’un gué. Le vainqueur voulut rendre hommage à l’iris qui lui avait sauvé la vie et fait gagner la bataille.
Il fit donc de cette fleur l’emblème de la France, et lui donna la place d’honneur sur son blason royal, jusque-là orné de trois crapauds…
Bien sûr, on se chamaille sur l’authenticité de l’histoire. Certains préfèrent la légende relatée dans l’Histoire des Francs par Grégoire de Tours, l’historien du royaume.
C’est une biche qui aurait signalé le gué à Clovis ; les buissons d’iris (iris de Croatie dits Pallida) ne lui auraient permis que de se cacher.
Et pourtant, à bien observer les fleurs de la couronne de France, on ne peut qu’y retrouver la silhouette des iris de nos jardins : mêmes pétales dressés, mêmes sépales baissés, tous au nombre de trois.
Mais alors d’où viendrait qu’on attribue au lys les vertus héroïques de l’iris ?
À un défaut de langue, prétend la légende ! Louis II le Bègue, roi des Francs (846-879) aurait fait, le premier, remplacer les symboles cosmiques, étoiles et soleils d’or du manteau royal et bleu des Carolingiens, copié sur le vêtement du grand prêtre de Jérusalem, par les iris.
On parla dès lors des « fleurs de Louis » qui devinrent, à force de mauvaise prononciation, les fleurs de lys.
À ses débuts, cette fleur incarnait la déesse Iris, messagère qui mettait un point d’honneur à n’apporter que de bonnes nouvelles aux dieux, mais aussi aux hommes, et signait ses missives d’un arc-en-ciel : « Dans l’Orient obscur / déployant un arc immense, l’iris brille au soleil couchant », chante Chateaubriand. Délicieuse et charitable, la déesse Iris aidait aussi les âmes fraîchement libérées des corps à rejoindre l’Olympe.
Aussi, pour attirer ses faveurs, les Grecs plantaient devant les tombes de grandes touffes d’iris blancs. Cette coutume, et le catalogue Cayeux m’ont aussi rappelé Les Iris, que peignit Vincent Van Gogh, à trente-trois ans, juste avant sa mort, un an à peine en vérité. Il venait d’être interné à Saint-Rémy-de-Provence.
Il avait le désir de consacrer les dernières années de sa vie à la peinture religieuse. « J’ai un besoin terrible de, dirai-je le mot, de religion », écrit-il à son frère Théo. Alors, il s’exerce à reproduire La Pietà et Le Bon Samaritain qu’avait signés Eugène Delacroix, puis La Résurrection de Lazare de Rembrandt.
Hormis eux, il n’imaginait aucun peintre capable de peindre le Christ, « artiste plus grand que tous les grands artistes » – et lui moins qu’un autre. Mais Les Iris alors, l’une de ses toutes dernières toiles ?
Que voit-on, au milieu de ce champ d’iris bleus ? Un iris blanc comme celui à qui les Grecs confiaient leurs prières pour l’Olympe et l’au-delà, comme le lys du Cantique en qui Bernard de Clairvaux voyait Jésus.
N’est-ce pas le Christ que Van Gogh a portraituré dans cet iris si beau, diaphane et solitaire, l’iris aux trois pétales, droit sur sa hampe, dans la vague des iris bleus penchés vers lui, prosternés presque ?
Christiane Rancé
Une légende rapportée par Louis Girard (1911-2003) rappelle que la fleur de lys est un iris stylisé dont Clovis a fait sa fleur favorite.
Malmené dans la bataille de Vouillé contre les Wisigoth et voyant qu'un fleuve barrait sa retraite, Clovis aperçu dans l'eau un grand nombre d'Iris et comprit qu'à ce endroit le fleuve était peu profond et qu'il pouvait le franchir avec son armée.
De ce fait, il aurait prît la fleur de lys sur fond bleu en souvenir de l'événement.
On raconte aussi que la Reine Clotilde, un peu portée sur les croyances et les superstitions, consultait souvent un ermite vivant en forêt de St Germain.
L'ermite lui avait remit un bouclier où figurait trois fleurs de lys, en référence à la sainte Trinité (Père, Fils et Saint-Esprit).
L'ermite affirma l'avoir reçu d'un ange pour que le roi s'en serve durant la bataille à la place de ses armes ornées de trois croissants ou de trois crapauds.
Selon l'ermite, ce bouclier devait lui assurer la victoire.
Depuis l'Iris aussi nommée "Reine des fleurs" devint l'emblème Franc, sa forme rappelant en outre celle de l'abeille stylisée que le père de Clovis (Childéric) avait adopté sur ses bannières.
Le lys ou l'Iris apparaît nettement dans le monde franc à la fin du règne de Pépin le Bref (714-768) et au début de celui de Charlemagne (742-814).
La fleur choisie par Clovis était un iris jaune.
La fleur de "Lys" serait en réalité la fleur "de Luce" ou fleur "de Louis", choisie par Louis VII (1120-1180) au XIIème siècle et qui par altération phonétique, "Luce" devint "Lys" et ainsi le symbole définitif de la Monarchie Française.
S'abonner au Blog Seraphim
Cliquer ICI