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13 novembre 2023 1 13 /11 /novembre /2023 20:36

Le père Dominique Salin, Jésuite, théologien et historien de la spiritualité, analyse les différences entre le développement personnel et le Salut chrétien.

Quelle différence y a-t-il entre le bien-être du développement personnel et le Salut annoncé par le christianisme ?

Père Dominique Salin : L’expérience spirituelle chrétienne, qui consiste à s’engager à la suite de Jésus, n’est ni une affaire de bien-être ou de mieux-être, ni tellement une question d’être sauvé ou pas.

C’est une histoire d’amour. Elle ne se décide pas comme d’aller voir un sophrologue.

L’amour vous tombe dessus brutalement par un coup de foudre ou vient progressivement.

Que ce soit celle du catéchumène ou d’une grande mystique comme ­Thérèse d’Avila, l’expérience spirituelle chrétienne est une affaire de passivité et d’attirance : on ne peut pas ne pas aimer Jésus, vivre de son esprit, essayer de l’imiter…

Qu’est-ce que le Salut ?

Père D. S. : L’expérience du Salut commence par un cri, « SOS, je me noie ! ». C’est une question de vie ou de mort. Pour un chrétien, être sauvé signifie que la mort cesse d’être le dernier mot de la vie. Le cœur de la foi chrétienne, le ­kérygme, c’est le Christ ressuscité, et chacun est promis à ressusciter comme lui, avec lui. Mais dans la réalité, la plupart des chrétiens ne sont pas chrétiens parce qu’ils veulent être sauvés de la mort.

On entend pourtant des personnes dire qu’elles ont été sauvées…

Père D. S. : C’est vrai, la personne dit : « J’ai été sauvée, je ne suis pas seule. Il y a de l’autre dans ma vie : l’Esprit Saint, l’Esprit de Jésus, Dieu… » C’est ça la foi.

À la différence du développement personnel où l’on cherche à parvenir à une meilleure maîtrise de soi par des techniques, dans l’expérience du ­Salut, on expérimente que des choses nous échappent, que nous ne comprenons pas tout dans notre vie.

Les demandes de bien-être et de bonheur sont légitimes. Que propose Jésus au regard de cela ?

Père D. S. : Jésus propose la joie, a fortiori à tous ceux qui sont accablés et croulent sous le fardeau. Je connais des personnes qui sont de vrais disciples de Jésus et qui vivent de grandes épreuves physiques ou affectives.

Elles ont une espèce de sagesse, de détachement par rapport à leur souffrance, à leur manque. Ce sont des saints.

Regardez Thérèse de Lisieux dans les dix-huit derniers mois de sa vie. Alors qu’elle vit une nuit de la foi terrible, toutes les carmélites lui disent qu’elle a un heureux caractère, qu’elle est toujours gaie. ­Thérèse écrit « si elles savaient »…

Dans le développement personnel, la demande est individuelle. La question du Salut n’est-elle pas collective ?

Père D. S. : Oui et d’ailleurs, chaque dimanche à la messe, nous disons dans un article du Credo : « Je crois à la communion des saints. »

Nous croyons à une solidarité des ­vivants, et à une solidarité des vivants et des morts. Nous, les chrétiens, ne sommes pas seuls. Il y a le Christ avec nous et nos frères humains.

Même ceux que nous n’aimons pas beaucoup, nous sommes solidaires d’eux parce que nous croyons que nous sommes tous image de Dieu. Tout homme, même le plus grand criminel, porte au fond de lui l’image du Christ recouverte par la rouille des mauvaises habitudes.

Être sauvé, c’est accepter cette réalité que nous sommes tous aimés et enfants de Dieu. C’est pouvoir dire oui à la Vie.

Recueilli par Florence Chatel

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