Je ne sais ni bêcher, ni herser, ni faucher,
Et je mange le pain que d’autres ont demé.
Mais tout ce que l’on peut moissonner de douceur,
Je l’ai semé, Seigneur.
Je ne sais ni dresser un mur de bonne pierre
Ni couler une vitre où se prend la lumière.
Mais tout ce que l’on peut bâtir sur le bonheur,
Je l’ai bâti, Seigneur
Je ne sais travailler ni la soie, ni la laine,
Ni tresser en panier le jonc de la fontaine.
Mais ce qu’on peut tisser pour habiller le coeur,
Je l’ai tissé, Seigneur
Je ne sais ni jouer de vieux airs populaires
Ni même retenir par cœur une prière.
Mais ce qu’on peut chanter pour se sentir meilleur,
Je l’ai chanté, Seigneur.
Ma vie s’est répandue en accords à vos pieds.
L’humble enfant que je fus est enfant demeuré,
Et le peu qu’un enfant donne dans sa candeur,
Je vous l’offre, Seigneur.
Maurice Carême