30 septembre 2008
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Au bord de ce nouvel automne, nous voici repris par les appels et sollicitations en tout genre, auxquels nous répondons avec plus ou moins de bonne volonté. J'aimerais y glisser une petite parabole qui nous enseigne le bon usage du non. C'est un père qui envoie ses deux enfants travailler à la vigne. Le premier dit non, puis il se repent. Le deuxième dit oui, mais il n'y va pas (Mt 21,28-32).
Or, le juste, dans cette histoire, c'est le rebelle ! C'est celui qui ne se précipite pas dans le oui, mais ose d'abord le non.
Nous sommes des gens polis, éduqués chrétiennement à nous tourner vers les autres, avec un zeste de culpabilité à signifier notre indisponibilité ou notre désaccord. Nous disons volontiers oui pour ne pas choquer, pour éviter les questions. Mais sous le couvert de la bienséance se joue parfois une autre partition. Nous faisons les choses comme ne les faisant pas, nous donnons l'impression d'être là alors que nous sommes ailleurs, nous flottons dans les événements comme dans des habits trop grands.
Nous sommes dans la « bonne volonté » qui veut soigner l'image d'elle-même, mais nous ne nous habitons pas en vérité. La traduction littérale du grec nous enseigne que le deuxième enfant, celui qui dit oui et ne fait pas, ne peut pas aller à la vigne parce que son moi est obèse et l'empêche de marcher. Plutôt que de dire « J'y vais », le texte grec écrit en effet: « Moi ». « Moi, Seigneur... et il n'alla pas » (Mt 21,30). Celui-là est incapable d'entrer dans le désir de l'Autre, parce qu'il n'y a pas de place en lui pour l'Autre. Le premier enfant, lui, a le courage d'être vrai. Il sait que répondre est coûteux, il ose l'écart et le droit de reconnaître qu'il n'a pas envie.
A la racine de nos vies, il y aura toujours cette parole du Père qui nous bouscule : « Va et travaille... » (Mt 21, 28). Le désir de l'Autre nous dénoyaute de notre tranquillité en nous donnant le monde à sarcler comme une vigne. Et la saveur de notre existence dépend de la réponse que nous lui offrons. Or, ceux qui entendent le mieux, ce ne sont pas ceux qui sont le mieux équipés spirituellement, mais ce sont ceux qui tout à la fois veulent et ne veulent pas, ceux qui savent trop le prix du oui pour le donner sans réfléchir.
« Heureux ceux qui osent d'abord dire non / Ils sont plus libres que les autres. / Heureux ceux qui écoutent après s'être écoutés / Ils entrent dans la volonté du Père./ Heureux ceux qui se laissent déplacer/ Ils ont encore un chemin devant eux. »
Pasteure Francine Carillo
Panorama No 446 septembre 2008