ON ENTEND PARFOIS DIRE : « AVEC DIEU OU SANS DlEU, TOUT CHANGE ! » C'est vrai.
Mais il vaut la peine de préciser cette affirmation. Pour le croyant, Dieu est le Seigneur vivant : sans lui, ni l'Univers, ni l'homme, ni l'Histoire ne peuvent s'expliquer.
Cela dit, Dieu reste Dieu même lorsque l'homme ne le reconnaît pas et n'arrive pas à adhérer à lui.
Pour le croyant, l'homme qui ne croit pas en Dieu a lui aussi été fait « à son image et ressemblance » (Genèse 1,26) ; lui aussi porte dans son esprit une étincelle de l'Esprit de Dieu et reste donc toujours capable de réaliser le bien, de distinguer le bien du mal, d'écouter sa conscience comme lieu ultime du jugement.
Une personne qui ne connaît pas Dieu n'est donc pas en proie au vide, au gouffre, à l'enfer !
Jusqu'au XVIIIe siècle, l'existence de Dieu n'était pour ainsi dire pas remise en question. Dieu était comme une nécessité pour le monde et pour l'humanité.
Mais plus tard, le discours scientifique et la philosophie n'ont plus permis de revendiquer Dieu comme nécessaire.
L'Église a réagi à cette évolution par la condamnation, mais l'homme moderne avait appris à se passer de Dieu, à penser et à vivre « comme si Dieu n'existait pas ».
Cette émancipation a eu le mérite de libérer l'homme de la peur d'un Dieu qui s'impose et lèse la liberté humaine.
Il faut reconnaître dans ce processus un dynamisme évangélique : l'Évangile, en effet, nous apprend à nous approcher de Dieu dans la liberté et par amour, et non sous la contrainte ; il révèle une image du Seigneur qui est relation et amour.
Et cet amour s'offre gratuitement, il ne s'impose ni n'exige d'être mérité. Le Dieu de Jésus est un Dieu non totalitaire, qui fait des humains ses enfants et non ses esclaves !
Ce Dieu est digne de foi précisément parce qu'il laisse l'homme libre de croire ou non ! Il faut même aller jusqu'à considérer cette « condition de liberté » où se trouve l'homme moderne comme une chance pour penser Dieu, pour revenir au Dieu révélé.
Car Dieu n'est pas que celui qui vainc nos limites et explique nos énigmes : il nous fait aussi entrer dans une relation d'amitié avec lui, nous ouvrant ainsi à la fraternité et à la communion avec tous les autres.
Oui, la présence même de ceux qui ne croient pas atteste que la foi est véritablement un acte de liberté !
Enzo Bianchi
juillet-août 2014 Panorama
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