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20 janvier 2015 2 20 /01 /janvier /2015 23:50

 

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Le signe en forme de croix tracé sur le front est un des rites les plus antiques de l'Eglise. Comme pour la plupart de ceux-ci, il pose bien des énigmes à celui qui entreprend de rendre compte de sa pratique et de son développement au cours de l'histoire. Le lecteur jugera s'il est possible, en rassemblant, comme ici, des renseignements épars dans la littérature patristique et liturgique, et en collationnant des études savantes, de parvenir à une vision moins imprécise. Cet exorde avoue suffisamment notre ignorance de bien des aspects du sujet abordé. été, parmi d'autres, une pomme de discorde entre les églises orthodoxes et l'occident latin.

Rien ne serait plus détestable que de reproduire et de prolonger les vaines et subjectives considérations d'une mauvaise apologétique. La question, en effet, n'est pas de savoir si l'on doit se signer à main ouverte, avec deux ou trois doigts, de droite à gauche ou inversement, ni même d'évaluer les justifications théologiques a posteriori de telle ou telle pratique. Il s'agit bien plutôt d'examiner si celui qui se signe participe par cet acte, de façon vivante, à la présence du Crucifié-Ressuscité. 

Communie-t-il à ce don avec une foi et un amour qui le portent à partager le sort du Serviteur pour parvenir en Lui à la Gloire? L'honneur et la dignité du signe de la croix est le bienfait spirituel que l'on en tire et non ses règles d'accomplissement.

Cela est d'autant plus vrai que la signation, comme geste, n'est pas spécifiquement chrétienne. Pas plus d'ailleurs que la forme de la croix, symbole de spécifiquement chrétienne. Pas plus d'ailleurs que la forme de la croix, symbole de bonheur que l'on retrouve sur des sceaux, des pendentifs, des stèles bien avant l'ère chrétienne. 

Ce fait, cependant, ne permet pas de conclure que les fidèles du Christ auraient emprunté aux cultes païens. Ils se sont plutôt montré les héritiers de la tradition messianique juive, comme nous allons le voir. Aussi convient-il, avant d'étudier le signe de la croix, le Tau, de s'attarder un peu sur le signe du Tav. 

Le signe du Tav

Il semble que, dans les toutes premières communautés judéo-chrétiennes les fidèles traçaient sur leur front une marque qui évoquait autre chose que le bois de la croix. En effet, le livre d'Ezéchiel annonce que les membres de la communauté messianique seront marqués au front du signe du Tav.

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Le Tav hébreu, dernière lettre de l'alphabet, désigne Dieu à la manière dont l'Oméga le fait en grec.

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Cette lettre Tav pouvait, au temps du Christ, être représentée par le signe + ou le signe x. Nous pouvons donc penser que le signe d'Ezéchiel en forme de croix, le sceau (sjragis), est bien le Nom du Père.

Ainsi, les premiers chrétiens, majoritairement d’origine juive, étaient marqués au front d’un Tav désignant le Nom de Yahwé au jour de leur baptême. La formule de saint Luc : "Celui qui ne porte pas sa croix et ne me suit pas, ne peut être mon disciple" peut comporter une allusion liturgique au Tav en forme de croix marqué sur le front. 

Cet usage chrétien du Nom de Yahwé ne paraîtra étrange qu'à ceux qui oublient que dans la communauté chrétienne primitive, comme le confesse une homélie du deuxième siècle, "le Nom du Père est le Fils." Déjà, dans l'Apocalypse, le saint apôtre, évangéliste et théologien Jean voyait 144.000 personnes" qui avaient le Nom de l'Agneau et celui de son Père écrits sur le front."

Le Tav des premiers Chrétiens désignait le Verbe-Nom du Père, et signifiait qu'ils lui étaient consacrés.

Lorsque les communautés devinrent majoritairement grecques, le Tav devint Tau et fut naturellement interprété autrement. Il fut compris comme la croix du Christ d'autant plus aisément que de nombreux passages des épîtres de saint Paul la mentionnent à la fois comme un sujet de gloire pour le chrétien et comme l'emblème de la rédemption de l'homme. Le signe de la croix est apparu à l'origine non comme une allusion à la passion du Christ, mais comme une désignation de la Gloire divine révélée dans le Verbe. Même lorsqu'il sera référé à la croix sur laquelle est mort le Christ, celle-ci sera considérée comme l'expression de la puissance divine qui agit par cette mort. Les quatre bras de la croix montreront le caractère cosmiquede cette action salvatrice. 

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Lorsque les communautés devinrent majoritairement grecques, le Tav devint Tau et fut naturellement interprété autrement. Il fut compris comme la croix du Christ d'autant plus aisément que de nombreux passages des épîtres de saint Paul la mentionnent à la fois comme un sujet de gloire pour le chrétien et comme l'emblème de la rédemption de l'homme. Le signe de la croix est apparu à l'origine non comme une allusion à la passion du Christ, mais comme une désignation de la Gloire divine révélée dans le Verbe. Même lorsqu'il sera référé à la croix sur laquelle est mort le Christ, celle-ci sera considérée comme l'expression de la puissance divine qui agit par cette mort. Les quatre bras de la croix montreront le caractère cosmique de cette action salvatrice.

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Si la signation du front était la pratique générale des premiers chrétiens, elle ne fut pas cependant exclusive. En effet, au IIème siècle, les Odes de Salomon ainsi que Justin font allusion à un signe de croix sur le visage. Sans doute s'agit-il là d'une autre façon de faire mémoire du baptême. En effet, dès les premiers siècles, les adultes candidats à l'Illumination faisaient l'objet de nombreux exorcismes dans lesquels le ministre accompagnait ses adjurations soit de l'imposition des mains, soit du signe de la croix tracé sur le front, les oreilles et les narines.

[...]

 La signation est devenue une protestation d'orthodoxie. 

Cela permet de comprendre que les fidèles aient préféré l'accomplir de façon bien visible, ce qui supposait un geste bien plus large qu'une petite croix sur le front. Un unique grand signe de croix sur le corps, à la manière ambrosienne, remplaça les multiples petits. 

Cette manière nouvelle de comprendre la signation, comme geste attestant la foi juste, permet aussi de saisir pourquoi, une fois la querelle monothélite apaisée, l'église grecque introduisit l'usage de se signer avec trois doigts en l'honneur de la sainte Trinité.

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Sans doute exprimait-on là le sentiment, par un retour à la tradition originelle, que l'identité du chrétien trouvait sa source et sa densité dans sa relation à la Trinité sainte, puisqu'il était baptisé "Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit." Car il est fort probable que dès l'antiquité, bien que nous n'en ayons aucun témoignage, certains aient accompagné leur signation de la formule baptismale. Cette manière de se signer à trois doigts deviendra progressivement générale. Elle sera commune à l'orient et à l'occident, comme nous le verrons plus loin, au début du douzième siècle.

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Luc de Tuy, écrit : "une question se présente concernant le signe de la croix, si, lorsque les fidèles font le signe de la croix sur eux-mêmes ou sur d'autres, la main doit se diriger de gauche à droite ou de droite à gauche. A quoi nous répondons, selon ce que nous croyons et tenons loyalement, que les deux méthodes sont toutes deux bonnes, toutes deux saintes, toutes deux aptes à surmonter la puissance de l'ennemi ; pourvu seulement que la dévotion du chrétien en fasse usage avec la simplicité catholique.

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Nous pouvons donc dire que, dans la manière de se signer, une lente évolution s'est accomplie en occident du VIII ème au XIII ème siècle. L'innovation de se signer de gauche à droite devenant peu à peu l'usage courant sans que la hiérarchie s'en alarme. 

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L'histoire de la signation ne s'arrête pas, bien sur, au XIV ème siècle.

Même si les règles générales de son accomplissement sont désormais fixées dans des traditions différentes en orient et en occident, dans chacune d'elles, la piété des fidèles ou leur tempérament national n'a pas manqué de les assortir de quelque originalité.

[...]

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Les églises orthodoxes montrent, elles aussi, de notables différences, et cela au point que, à la manière de se signer, on peut reconnaître la nationalité des fidèles. L'immense signe de croix russe accompagné d'une profonde inclinaison du corps diffère autant du triple petit balayage pectoral grec conclu par un coup sur la poitrine que du signe de croix latin.

Hiéromoine Nicolas (Molinier)

http://eocf.free.fr/compression/signe_croix.pdf

http://www.seraphim-marc-elie.fr/

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