Nombre d'Occidentaux pensent s'être débarrassés des mythes. Mais la fourmi qui marche sur un tapis brodé n'en voit ni les couleurs ni les motifs, car elle manque de hauteur...

Au XXe siècle, les populations ont peu à peu pris leurs distances avec le christianisme.

La plupart des chrétiens d'aujourd'hui voient la Bible comme une somme de récits symboliques, auxquels il n'est plus nécessaire d'adhérer pour avoir la foi.

Ils ne croient plus aux serpents qui parlent ni aux vierges fécondées par l'oreille. Tout Occidental a ainsi dû faire le deuil d'une partie de l'explication du monde, mais pas de toute explication du monde. En témoignent les croyances de type « New Age » qui explosent parallèlement à l'athéisme.

Avec l'accélération de l'Information via Internet, chacun se fabrique désormais ses propres mythes comme il se fournirait dans un supermarché des croyances : la vieille histoire de Gaia, la Terre-Mère, ressurgit, rhabillée sous l'étiquette bio et durable, saupoudrée d'un peu de bouddhisme, de quelques restes de christianisme...

Et certains mythes, bien qu'aménagés, sont encore actifs! On peut comparer par exemple les récits d'initiation chamanlque collectés au XIXe siècle en Sibérie avec les histoires contemporaines d'enlèvements par des extraterrestres : tous racontent une lumière qui attire irrésistiblement, une échelle qui se présente pour grimper (dans un ovnl ou dans une grotte céleste), des êtres bizarres (dieux ou extraterrestres) qui dissèquent les humains, un message à délivrer à l'humanité...

C'est la même structure narrative, le méme mythe en version traditionnelle ou techno!

Comme quoi les mythes ne sont jamais si présents que lorsqu'on ne les voit pas.

Jean-Loïc Le Quellec

in N° 147 des Cahiers Science & Vie , L'origine des mythes