Plus on est uni au prochain, plus on est uni à Dieu. Pour que vous compreniez le sens de cette parole, je vais vous donner une image tirée des Pères : Supposez un cercle tracé sur la terre, c'est-à-dire une ligne tirée en rond avec un compas, et un centre. On appelle précisément centre le milieu du cercle.
Appliquez votre esprit à ce que je vous dis.
Imaginez que ce cercle c'est le monde, le centre Dieu, et les rayons les différentes voies ou manières de vivre des hommes. Quand les saints, désirant approcher de Dieu, marchent vers le milieu du cercle, dans la mesure où ils pénètrent à l'intérieur, ils se rapprochent les uns des autres en même temps que de Dieu. Plus ils s'approchent de Dieu, plus ils se rapprochent les uns des autres ; et plus ils se rapprochent les uns des autres, plus ils s'approchent de Dieu.
Et vous comprenez qu'il en est de même en sens inverse, quand on se détourne de Dieu pour se retirer vers l'extérieur : il est évident alors que, plus on s'éloigne de Dieu, plus on s'éloigne les uns des autres, et que plus on s'éloigne les uns des autres, plus on s'éloigne aussi de Dieu.
Telle est la nature de la charité. Dans la mesure où nous sommes à l'extérieur et que nous n'aimons pas Dieu, dans la même mesure nous avons chacun de l'éloignement à l'égard du prochain. Mais si nous aimons Dieu, autant nous approchons de Dieu par la charité pour lui, autant nous communions à la charité du prochain ; et autant nous sommes unis au prochain, autant nous le sommes à Dieu.
Dorothée de Gaza (v. 500-?), moine en Palestine
Instructions, VI, 76-78 (trad. SC 92, p. 281-287)