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11 août 2011 4 11 /08 /août /2011 22:10

Les spirituels de toutes religions insistent souvent sur l'importance de vivre l'instant présent. Personnellement je n'y arrive pas.

 

Votre lettre m'incline à penser que vous souffrez d'une maladie très courante actuellement «L'incapacité à se poser». Très courante, car beaucoup de nos contemporains sont incapa­bles de prendre le temps de s'arrêter, et de vivre consciemment l'instant présent. Les causes de ce mal sont multiples.

 


Il y a tout d'abord ceux qui interprètent l'ex­pression «instant présent» à tort comme une invitation au Carpe diem; cette locution latine, tirée d'une ode d'Horace, que l'on traduit en général par : «Cueille le jour présent». En lan­gage moderne, cette expression se rapproche de l'injonction si fréquente dans nos sociétés profitons de la vie, car on ne sait jamais de quoi demain sera fait.

  


A contrario, il y a aussi ceux à qui l'on a inculqué qu'un bon chrétien ne devrait jamais s'arrêter de penser aux autres et être toujours dans l'ac­tion... Et que penser à soi, ou prendre du temps pour soi relevait de l'égoïsme, donc du péché.

 

N'oublions pas non plus ceux qui considèrent que s'arrêter est quasiment synonyme de mort. Cesser d'agir semble alors constituer l'anti­chambre du «repos éternel», provoquant un sentiment de panique, conjuré uniquement par une boulimie d'activités.

 

Enfin, ceux qui n'existent que dans le «faire» au mépris de «l'être», notion qu'ils assimilent à une élucubration de philosophes ou de paresseux.

 

Je ne sais ce que proposent les autres grandes religions à ce sujet. Mais, sachez que le christia­nisme ouvre tous les éléments de réflexions et les pistes nécessaires. J'ajouterais que cette confu­sion entre vivre l'instant présent et profiter de tout traduit une ignorance à la fois du message du Christ et de l'héritage de la mystique chré­tienne.

 

Vouloir sans cesse «s'oublier» en étant constamment tourné vers les autres, c'est se condamner à vivre en passant à côté de soi.

 

En­suite, ne plus «s'asseoir» par peur de mourir, c'est risquer de s'épuiser physiquement dans un tourbillon d'activités.

 

Enfin, n'exister que parle «faire» plutôt que par «l'être» revient à mal se préparer à vivre sa vieillesse, période où la vie dite «active» sera derrière nous.

 

Une question vitale pour chacun d'entre nous.

 

Dans l'Evangile, n'est-ce pas le Christ qui nous invite à ne pas regarder en arrière ni nous in­quiéter de l'avenir ?

 

Comment se situer alors sinon en adoptant une attitude de disponibilité et d'écoute de Dieu ?

 

N'est-ce pas le Christ qui, au retour de mission de ses disciples, ne les in­terroge ni sur ce qu'ils ont fait, ni sur le nombre de personnes qu'ils ont converties ou guéries, mais leur dit : «Asseyez-vous et prenez du re­pos» ?

 

Dès lors, l'appel des mystiques chrétiens, tel Grégoire de Nysse, n'obéit ni à la paresse ni à l'égoïsme. Combien d'idées fausses courent en­core au sein même de nos communautés ! Il en va de même dans la relation entre époux. Si vous être marié, je pense qu'au moins une fois votre épouse vous a dit : «Je t'aime.» Et cette pa­role, que vous avez pris le temps de recevoir en pleine conscience, a été décisive pour l'avenir de votre relation de couple.

 

Alors, comment pouvons-­nous répondre à l'appel de Dieu : «Ecoute», si nous sommes sans cesse en train de bouger et d'agir ?

 

Vivre l'instant présent consciemment revient à adopter au quotidien une attitude de disponibilité à Dieu, aux autres, et à soi.

 

Prêtre depuis dix ans, je suis convaincu que nous ne pouvons pas prier, si n'en faisons pas l'apprentissage. Vous le voyez, votre question est vitale, car prier c'est respirer. Mer­ci de me l'avoir posée.

 

(référence perdue)

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