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27 juin 2018 3 27 /06 /juin /2018 22:56
La sciure et les larmes

Récit. Revenant sur la mort de son père en Limousin au début de ce siècle, Jean-Marie Borzeix nous conduit au vertige des deuils conjugués. Bouleversant.
L’Homme qui aimait les arbres
de Jean-Marie Borzeix

Éd. Bleu autour, 80 p., 12 €

 

 

 

De quel bois était fait ce père marchand de bois ? Jean-Marie Borzeix ausculte après coup son géniteur nonagénaire ; tout comme celui-ci jaugeait, jadis, les différentes essences, sur pied, ou sous forme de troncs reposant dans la forêt.

Debout parfois, allongé le plus souvent, dans une maison de retraite de Bugeat (Corrèze), le vieil homme est remémoré, des racines à la ramure, ou de l’écorce à la moelle.

Cet Ernest, à l’heure de sa mort, ruse, simule, triche, anticipe et angoisse, en une parole qui se raréfie jusqu’à devenir série de signaux.

Son fils le conduit au trépas non sans obliquer, tournoyer, composer : privilège de l’écriture et de son alchimie que d’aller droit au but en temporisant.

Il en résulte des pages d’une densité déchirante sur ce qui nous arrive et nous arrivera, sur ce que nous avons vu ou verrons chez nos proches : « Je l’entends marmonner : “C’est une fin de saison.” »

Né en 1909, décédé quelque quatre-vingt-quinze ans plus tard,

Ernest a vécu assez longtemps pour voir disparaître la France rurale, à mesure que lui-même perdait de la superbe dominatrice dont il avait hérissé sa personne.

Cette double extinction s’avère le cœur du livre.

À la fin des fermes autarciques du plateau de Millevaches, des chemins vicinaux, de l’importance des saisons ou de ces petites églises pleines à craquer le dimanche, répondent les ravages de l’âge dépouillant un patriarche au point de lui conférer une douceur diaphane.

Celle-ci le rend enfin abordable aux siens, qu’il reconnaît à peine, avec cependant l’espoir chevillé à l’âme de retrouver aux cieux tous les proches qu’il a vus s’éteindre.

Jean-Marie Borzeix avait déjà fait retour sur un épisode tragique de la dernière guerre en sa Corrèze de givre et de silence (Jeudi saint, Stock, 2008).

Ici, son écriture retenue ne cesse d’étirer le temps et l’espace, à partir d’un point nodal final : cette chambre où s’achève une vie, qui gagne en épaisseur cosmique ; entre Tarnac, Bonnefond et Saint-Merd-les-Oussines, dans cette nature hantée par « les femmes noires de Corrèze » évoquées par ­André ­Malraux lorsqu’il entonna le thrène de Jean Moulin, au Panthéon, un jour de décembre 1964.

Tout se termine de nos jours dans un salon funéraire.

L’abattement d’un fils se fait alors désespérance prophétique : 

« Il est désormais interdit de garder un mort dans son lit d’agonie.

Comme si la santé publique avait été mise en péril par la foule des morts veillés depuis des siècles dans la pénombre des fermes !

C’est aussi pour avoir éloigné leurs morts qu’en ce début de siècle meurent les campagnes. »

Antoine Perraud

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31 mai 2018 4 31 /05 /mai /2018 22:55
Un  Jardin  en  Cévennes

Un Jardin en Cévennes

            "La nature, nous dit Frère Jean, est un livre pour ceux qui cultivent la terre de leurs mains, qui découvrent que la création révèle une sagesse universelle. L’acte quotidien éduque le jardinier en aiguisant sa vigilance. Tout lui parle dans la simplicité de l’instant : le chant d’une source, la rotation d’une rose amoureuse du soleil, la louange d’un coquelicot qui embrasse le ciel…"

            Ce livre propose des paraboles que l’auteur compose à partir de son expérience de jardinier, elles sont illustrées par de nombreuses photographies réalisées dans l’enceinte du monastère. Ces paraboles d’aujourd’hui n’ont pas la prétention d’être un traité de théologie, de philosophie ou d’agronomie, mais décrivent l’ouverture du cœur. Elles sont une promenade méditative, le témoignage poétique de la foi d’un homme qui a choisi de consacrer sa vie à Dieu et qui essaie de la partager avec ses frères à travers les actes simples du quotidien.

Préface pour la nouvelle édition de Pierre Rabhi : « Merci à Frère Jean de nous permettre avec son «Jardin en Cévennes » de partager son regard, sa poésie et son admiration pour la création ».

          Préface pour la première édition de Jean-Marie Pelt : « De ce livre, où chaque petit récit est à déguster et à méditer en silence, émanent une paix profonde et une atmosphère de haute spiritualité et de contemplation ».

Parution           : Juin 2018 (1ère édition Un jardin en Lozère en 2009)

Format             : 210 x 210 - 50 pages, nombreuses photos

Éditeur             : Art Sacré – Le Verdier - 48 160 Saint-Julien-des-Points

Prix                 : 12 Euros

Presse               : Père Gérasime Tél : 04 66 45 42 93 – 06 08 61 65 66 - Email : skite.saintefoy@wanadoo.fr

Points forts :

- Lien poétique entre la nature et la vie spirituelle.

- Belles et nombreuses photographies en couleur.

- Préface de Pierre Rabhi pour la nouvelle édition, de Jean-Marie Pelt pour la première édition.

- Témoignage écologique et patrimoine cévenol - Livre cadeau.

Auteur :

 Après des études de photographie à l’école Lumière, Gérard Gascuel, né en 1947, originaire d’Alès en Cévennes, travaille comme photojournaliste, il présente de nombreuses expositions en France et à l’étranger.

            Devenu moine orthodoxe à 33 ans, il reçoit le nom de Frère Jean au monastère de Saint Sabba dans le désert de Judée. En 1993, il fonde la Fraternité Saint-Martin, une association qui regroupe plus de 950 membres et en 1996 le Skite Sainte-Foy, un monastère orthodoxe dans les Cévennes.

            Il est l’auteur de plusieurs ouvrages :

- Le mont Athos. Diaporama - (Ed. du Berger - épuisé)          - Hommes de Lumière (Mame, - épuisé),

- Fils de Lumière (Jacqueline Renard, 1990)               - Jardin de la Vierge (Jacqueline Renard, 1991),

- J’ai soif d’une eau de vie… (Terre du Ciel, 1994)     - l’Amour en question (Le Fennec, épuisé),

- Insaisissable fraternité (en collaboration avec Alain Finkielkraut, Albert Jacquard, Dervy, 1998).

- Jardin de la foi aux Presses de la Renaissance, réédité plusieurs fois (épuisé).

- Un jardin en Lozère (CG, 2009, épuisé) - Pierres vivantes, Musée Art Sacré de Pont-Saint-Esprit 2010

- Visages de lumière, Marseille Capitale Européenne de la Culture 2013 - Fondation du skite sainte Foy 2016

- Signes de lumière, franco-russe 2017.

 

 

Contact avec l’auteur :                            Frère Jean - Skite Sainte Foy

                                                              48160 Saint-Julien-des-Points

Tél : 04 66 45 42 93 – 06 08 61 65 66

Email : skite. saintefoy@wanadoo. fr

                                                               Site : www. photo-frerejean. com

 

Contact avec l'Editeur                      Edition Art Sacré  - Skite Sainte Foy

48160 Saint-Julien-des-Points

Tél : 04 66 45 42 93 - Email : skite. saintefoy@wanadoo. fr

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9 mai 2018 3 09 /05 /mai /2018 22:57
Je rentrerai avant la nuit

"Je rentrerai avant la nuit" est le témoignage d'amour et de fidélité de Sophie à son mari Cédric après un grave accident. Une vie bouleversée et acceptée.

Après seulement quelques mois de mariage, Cédric, le mari de Sophie, a un grave accident de vélo. C’était en 1998. Du choc à la révolte, du déni à la colère, Sophie a traversé de nombreuses périodes de troubles et de turbulences. Des doutes, oui, mais surtout deux convictions profondément ancrées en elle : son amour pour Cédric et sa foi en Dieu. Rencontre.

Aleteia : Vous venez de publier un livre, Je rentrerai avant la nuit, où vous racontez ce que vous avez vécu depuis l’accident de Cédric, votre époux (devenu handicapé à la suite d’un traumatisme crânien NDLR). Qu’est-ce qui vous a poussé à partager votre témoignage ?
Sophie Barut : Lorsque mon mari a eu un accident de vélo il y a vingt ans, en 1998, j’ai tenu un journal qui m’a énormément aidée à poser mes émotions. J’en avais besoin pour y voir clair. Je ne l’ai pas lâché pendant six ans, jusqu’à l’arrivée de notre premier enfant. Je me souviens qu’à l’époque j’avais un besoin grandissant de connaître des expériences similaires, celles d’épouses qui avaient vécu ce que je vivais, qui avaient choisi de rester fidèle après l’accident de leur mari, qui voulaient fonder une famille… Mais je n’ai jamais trouvé ce genre de témoignage. Il y a quelque temps, des amis m’ont dit que c’était peut-être à moi de l’écrire. L’idée a fait son chemin et c’est ainsi qu’est « né » Je rentrerai avant la nuit.

Cet accident est arrivé alors que vous étiez mariés depuis huit mois à peine… Aviez-vous déjà imaginé la possibilité qu’une telle chose puisse arriver ?
Quinze jours avant l’accident de vélo, j’avais croisé Cédric sur la route alors que je roulais en voiture et je me souviens m’être dit : « Qu’est-ce qu’il est fragile sur son vélo ! ». Au-delà de ça, nous avions fait notre préparation au mariage avec la communauté Saint-Joseph. Il s’avère que dans le couple venu nous préparer au mariage, l’épouse était en fauteuil roulant. J’étais impressionnée car je ne connaissais pas ce milieu mais pendant leur témoignage je n’y avais même pas fait attention. Un mois ou deux après notre mariage, j’ai fait une retraite ignatienne dans la Drôme et on nous a demandé d’offrir à Dieu ce à quoi on tenait le plus sur terre : j’ai offert mon mari… Le bon Dieu m’a pris au mot. Après l’accident, j’ai repensé à tout cela et je me suis dit : parce qu’Il a pris ce à quoi je tenais le plus au monde c’est qu’Il va m’aider. Le début d’une cohérence.

On se projette dans une vie et, tout d’un coup, il faut la déconstruire pour la reconstruire différemment. Comment l’accepter… et y arriver ?
Sur le moment je l’ai complètement refusé, je n’arrivais pas à me dire qu’il était sur la route, inanimé. Jusqu’alors, je n’avais jamais vécu de drame dans ma vie. Quand le gendarme m’a appelé pour me dire qu’un jeune homme correspondait à la description, j’ai tout simplement hurlé « non ». Je ne pouvais pas le concevoir. Quand je l’ai vu, j’ai compris que c’était la réalité, que ma vie allait radicalement changer. Pendant longtemps, j’étais dans l’espérance un peu naïve qu’il allait se réveiller et que tout allait redevenir comme avant mais petit à petit j’ai dû faire mon deuil de plein de choses. Le « il ne pourra pas travailler pendant 15 jours » s’est transformé en « il ne pourra pas travailler pendant six mois » jusqu’à « il ne pourra pas travailler toute sa vie ». J’ai oscillé entre des moments de révolte où je passais des journées à maudire la pesanteur, la fragilité du corps humain, où je m’interrogeais sur la raison qui pouvait justifier de nous donner autant pour ensuite nous retirer nos facultés… Et des moments de confiance totale en Dieu.

Dans votre livre vous évoquez une sorte de joie qui, malgré les épreuves, était ancrée en vous…
C’est exactement ça ! J’ai été portée par les prières de mes amis et je me souviens d’une joie enracinée en moi malgré le dramatique de la situation. Je me disais que le bon Dieu pourvoirait à tout et je me suis remise entre ses mains. À un moment, je me suis interrogée : « Est-ce que les réponses à tes questions te font avancer ou te détruisent ? » J’ai alors pris la décision d’avoir une belle vie malgré des circonstances difficiles… Le regard de mes amis a aussi été très important pour moi. L’amour de ses amis, la chaîne de soutien que cela a déployé m’a redonné courage. Aux moments douloureux, un ami m’a dit : « N’essaye pas de porter l’avenir, les grâces tu les auras au fur et à mesure ». Profiter de l’instant présent est une discipline. Une discipline de chaque instant. Et de cette discipline peut naître le bonheur.

Vous aviez 25 ans au moment de l’accident. Dans votre livre, vous racontez le discours tenu par certains membres du corps médical qui vous conseillaient de partir et d’abandonner Cédric. Comment avez-vous reçu ces paroles ?
J’ai été très surprise. Je me souviens par exemple d’une rencontre avec une assistante sociale. Je pensais qu’elle allait me donner des armes pour y arriver, qu’elle allait écouter mes aspirations afin de m’aider à aller dans cette direction. Mais non. Elle me conseillait de partir tout de suite et que ce serait plus facile pour lui. Elle pensait que je faisais l’autruche et me voyait comme quelqu’un de jeune, d’idéaliste, de naïf. Elle m’affirmait que si je restais, j’allais être garde-malade toute ma vie et que de toute façon si je partais, personne n’allait me le reprocher. Mais quand il a été fauché, je me suis dit que je n’allais pas abandonner mon mari. Je lui ai répondu que je ne pourrais plus me regarder dans une glace si j’abandonnais Cédric. J’étais habitée d’une conviction : même si l’on commence par le pire, le meilleur est à venir. Et j’ai été portée par cela : quand je communiais ou que j’allais à une adoration, Dieu m’a vraiment envoyé des grâces sensibles.

Pourquoi avoir choisi de rester ?
C’était un élan d’amour. Ce drame nous a fauchés au début de notre mariage ; Cédric était l’homme que j’attendais depuis vingt ans. Je l’ai rencontré trois mois après une rupture douloureuse. On était très proches sur de nombreux points : artistique, littéraire, poétique… C’est lui qui m’a initié à la philosophie ! Quand il a été fauché je ne pouvais me résoudre à abandonner celui que j’aimais. Il y avait tellement d’amour, de douceur et d’envie de s’en sortir pour moi dans ses yeux !

Cet accident a eu lieu il y a vingt ans. Vous avez aujourd’hui quatre enfants âgés de 14, 12 ans, 10 et 7 ans. Comment avez-vous réussi à retrouver une vie de couple après un tel traumatisme ?
Durant les six premières années qui ont suivi l’accident, je ne voyais pas bien comment ne pas être une infirmière pour Cédric. Quand j’ai vu qu’il commençait à aller mieux physiquement et intellectuellement, j’ai envisagé d’avoir des enfants avec lui. Mais il y avait toujours un blocage car je m’occupais de sa toilette, son habillage, ses déplacements chez les thérapeutes, ses repas… J’ai alors réalisé que son corps devait reprendre sa part de mystère, cette distance nécessaire à la séduction devait se réinstaller entre nous, comme avant son accident. Petit à petit nous avons donc fait appel à des auxiliaires de vie pour la toilette, des ambulanciers pour les déplacements, des taxis pour fauteuil roulant… Grâce à ces respirations, nous avons (re)découvert ce qu’était véritablement l’amour conjugal. Nous avons ainsi pu avoir notre premier enfant quelques semaines après avoir pris cette décision !

 

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