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13 janvier 2016 3 13 /01 /janvier /2016 23:56
Photo François-Xavier Dureux

Photo François-Xavier Dureux

La porte s'ouvre. Les branches saluent le paysage qui vient se poser là dans son immédiateté de paradis. Pas un homme, pas une bête. Le paysage est nu. Il n'y a rien à ajouter.

Inutile de franchir ce seuil. Je suis au bord d'un monde à vénérer. Le langage ici ne peut être qu'un oiseau qui repart aussitôt.

Pourquoi une prairie d'un vert tendre et quelques arbres lointains doit-il prendre toute la place et m'invite-t-il à disparaître discrètement ?

C'est comme s'il s’immisçait jusque dans ma respiration Tout est paisible ici. Il n'y a ni poses, ni miroirs. Les effets ne sont pas de mise.

Les dernières sentinelles de la forêt époussettent de leurs branches ce qu'il y a d'inutile. Tout est donné en cet instant même. La porte ne se ferme jamais. Seuls les yeux se détournent.

Je suis ce monde. Il est en moi, comme une perle dans son écrin. je peux l'emmener partout avec moi. Je suis son repos et son invitation à m'y reposer.

Il est une caresse de l'être à la naissance de l'hiver, une tendresse pour qu'advienne un visage, seuil vers l'ouvert.

D'ailleurs le chemin s'arrête juste à la frontière du champ. ll n'y a plus de chemin. Inutile d'aller plus loin. C'est le paysage qui vient.

C'est lui qui étreint, c'est lui qui apaise. C'est lui qui donne et guérit le cri, apporte le silence comme on revêt une robe, avec respect et fragilité.

Il n'y a rien à franchir. Il n'y a pas à s'élancer. Ce serait une profanation. Non, simplement être bien dans cette distance qui est aussi un échange, un dialogue secret.

Il y a simplement à se laisser faire par quelques brins d'herbe et une ligne d'arbres, une route blanche où ne passe personne. Un accord vient et s'installe. Il n'y a plus qu'à se taire.

 

François-Xavier Dureux
 

 
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22 décembre 2015 2 22 /12 /décembre /2015 23:23
Rêve d'enfant

http://www.seraphim-marc-elie.fr/

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21 décembre 2015 1 21 /12 /décembre /2015 23:38
Le grain de sénevé

Au commencement

Au-dessus du sens

Là est le Verbe. 

Ô trésor si riche 

Là le commencement

fait naître commencement

Ô poitrine du Père

avec grand plaisir

En coule le Verbe !

Et pourtant le sein

Garde le Verbe

Cela est vrai.

Des deux un fleuve,

D'Amour le feu, 

Les deux unis

Aux deux commun,

le Très-Doux Esprit

Très égal, 

Inséparable.

Les trois sont Un.

Sais-tu quoi ? Non. 

Il se sait lui-même : en entier,

Au mieu

La boucle des trois

A une profondeur terrible,

Le pourtour lui-même

Jamais sens ne saisit:

Là est une profondeur sans 

Fond

Échec et mat

Temps, formes et état ! 

L'anneau merveilleux

Est un jaillissement, 

Tout immobile se tient son point

Le mont pointu

Gravis-le sans agir

Intelligence

Le chemin t'emmène

En un merveilleux désert, 

Au large, au loin,

Il gît sans limite. 

Le désert n'a

Ni temps ni état, 

Sa façon lui est particulière. 

Ce désert le bien

Jamais pied n'y passe 

Sens créé

Jamais n'y vint 

Cela est; et personne ne

Sait quoi 

Cet ici, ce là, 

Ce loin, ce près, 

Ce profond, cet haut, 

Ceci est ainsi

Que ce n'est çà

Ni ci. 

Cette lumière, cette clarté

Cette ténèbre complète, 

Cet innommé, 

Cet ignoré,

Libre du début et aussi 

De la fin. 

Cela paisiblement se tient désolé, sans vêtement.

Qui sait sa demeure? 

Qu'il en sorte ! 

Et nous dise quelle est sa forme. 

Deviens comme un enfant, 

Deviens sourd deviens aveugle ! 

Tout ton être doit devenir néant,

Passe au-dessus de tout être, tout néant ! 

Laisse l'état laisse le temps, 

Et aussi les images !

Allant sans voie 

Par le sentier étroit, 

Ainsi arrives-tu

À la trace du

Désert

Ô mon âme,

Va dehors ! Dieu, dedans ! 

Sombre tout mon être

Dans le néant divin

Sombre en ce fleuve sans fond ! 

Que je te fuis, 

Tu viens à moi

Que je me perde 

Alors, je Te trouve,

Ô Bien suressentiel !

Poème de Maître Eckhart - Granum Sinapis

Le «Granum Sinapis» (Grain de Sénevé) est un témoignage de la connaissance intuitive propre au mystique.

Ce poème, né dans la vallée du Rhin au quatorzième siècle, est sans doute l’unique poème de Maître Eckhart.

Rédigé en Haut-Allemand, l’auteur a ainsi confié à la langue commune ( alors que le commentaire est en latin ) le soin de véhiculer jusqu’à nous ce joyau.

Dante, à pareille époque, fit de même en choisissant l’italien pour confier au « plus ordinaire » le soin d’accueillir, préserver, voiler et transmettre les traces du « plus Haut »!

Dans le commencement
(cela passe le sens)
là jaillit le Verbe
trésor inépuisable
aurore de l’aurore !
Ô le cœur d’un tel Père
qui de sa propre joie
tire le flot du Verbe
mais Le garde en son sein
ce Verbe ! ô vérité !

Des deux se noue un fleuve,
où coule amour et feu
formant le lien des deux
le bien connu des deux :
le flux du doux Esprit
à leur même mesure
et que rien ne sépare.
Car les Trois ne font qu’un.
Quoi le saurais-tu ? Non.
Lui seul sait ce qu’Il est.

Mais de ces trois la boucle
insondable et terrible
naît de leur propre ronde,
le sens ne peut saisir
l’abîme ici sans fond.
Avoue : « Echec et mat ! »
Sans lieu ni temps ni forme
cet anneau merveilleux
est un jaillissement
en son point - immobile -

Ce point est la montagne
à gravir sans agir,
comprenne qui pourra !
La voie te conduit
au Désert admirable
qui au large et au loin
déployé sans limite
hors du lieu - hors du temps -
se suscite en Lui-même
parfait de Son seul Être.

Désert Tu es le Bien
par aucun pied foulé
jamais le sens créé
ne saurait y aller :
c’Est (personne ne sait)
c’Est ici et c’Est là
c’Est loin et c’Est bien près
c’Est profond et c’Est haut
et si c’Est donc ainsi
ce n’Est ni ça ni ci.

C’Est lumière et clarté
c’Est aussi la ténèbre
l’innomé - l’inconnu -
libéré du début
qui échappe à la fin,
c’est en paix qu’Il se tient
vêtu de nudité.
Qui connaît Sa maison ?
Ah ! Qu’il en sorte enfin
et nous dise Sa Forme.

Deviens comme un enfant,
rends - toi sourd et aveugle !
Car ton être lui-même
doit devenir le rien,
dépasse être ou néant !
Délaisse lieu et temps
et quitte les images !
Trouve au sentier étroit
(sans le vouloir chemin)
l’empreinte du Désert.

Eloigne - toi mon âme
puisque Dieu est dedans !
Que sombre tout mon être
en ce Dieu de non-être,
dans Son fleuve sans fond !
Alors - si je Te fuis -
c’est Toi qui viens à moi.
Si je deviens ma perte
c’est Toi seul que je trouve,
Toi le Bien sans mesure !

Traduction : Antoine de Vial

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