Jean-Luc Marion, philosophe, Gilles Kepel, spécialiste du monde arabe, Thomas Römer, exégète, philologue et bibliste suisse, Delphine Horvilleur, rabbin, étaient les invités du Monde Festival au Palais Garnier, dimanche 21 septembre 2014 de 10 heures à 11 h 20. Une table ronde animée par Nicolas Weill, journaliste au Monde.
 

On parle beaucoup « fait » religieux, ou de son retour. Politique ou comportementale, l'adhésion à une religion semble désormais se concentrer sur les comportements, que ceux-ci soient vestimentaires ou alimentaires, et non sur la foi ou la croyance. Sans parler de la mystique, dimension de plus en plus évanescente.

Tout se passe comme si plus les rites s'affichaient dans l'espace public, plus la rencontre avec Dieu se faisait discrète.

La défiance vis-à-vis des représentations traditionnelles de la divinité gagne jusqu'aux dignitaires et desservants des cultes. De fait, entre les progrès de la critique et de l'archéologie, qui ont amené à repenser de fond en comble le récit biblique, la résistance du mal et de l'injustice dans le monde et les progrès de la science, l'exercice favori des théologiens et des philosophes de jadis devient de plus en plus impraticable.

Dieu n'en serait-il pas néanmoins indispensable pour penser la morale ? Mais le développement d'une éthique de terrain, qui s'intéresse plus aux conséquences de nos actions qu'aux principes, remet elle aussi en cause Sa centralité dans ce domaine où la référence à Dieu se fait aussi moins sentir. La célèbre sentence des Frères Karamazov – « Si Dieu n'existe pas alors tout est permis » – pourrait finalement se révéler fausse. Dès lors, quel besoin avons-nous d'une entité suprême ?

Quatre intellectuels engagés dans leur dénomination respective, Jean-Luc Marion, Delphine Horvilleur, Abdelwahab Meddeb et Thomas Römer tenteront d'y réfléchir.

Animé par Nicolas Weill

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/festival/article/2014/05/21/pourra-t-on-encore-croire-en-dieu_4421573_4415198.html

Jean-Luc Marion - Philosophe
Philosophe catholique, cet académicien est un des rares penseurs français à partager sa carrière entre la France – il enseigne la métaphysique à l'université Paris-Sorbonne, et les Etats-Unis, où il occupe le poste de professeur invité au département de philosophie de l'Université de Chicago. Il est l'auteur d'une œuvre importante et diverse – dont un essai récent sur Courbet, La Peinture à l'œil (Flammarion) – qui se situe à la croisée de l'histoire de la philosophie, de la théologie et de la phénoménologie.

Gilles Kepel - Spécialiste du monde arabe
Politologue et historien, Gilles Kepel a enseigné aux universités de New York et de Columbia. Il a aussi été titulaire de la chaire d'histoire et de relations internationales de la prestigieuse London School of Economics entre 2009 et 2010. Il est l'auteur de nombreux ouvrages sur l'islam politique et sur son évolution parmi lesquels Jihad. Expansion et déclin de l'islamisme (Gallimard, 2000)

Thomas Römer - Exégète, philologue et bibliste suisse
Thomas Römer enseigne la bible hébraïque à la Faculté de théologie et de sciences des religions à l'université de Lausanne. Depuis 2007, il est titulaire de la chaire des « Milieux bibliques » au Collège de France. Ses travaux sur le Pentateuque ont contribué à renouveler profondément la compréhension de la Bible et de l'environnement social où elle a vu le jour, ainsi que de la constitution des traditions juives sur les Pères, notamment Abraham et Moïse.

Delphine Horvilleur - Rabbin
D'abord journaliste, Delphine Horvilleur est partie étudier dans une école rabbinique libérale à New York. Après avoir reçu son ordination en 2008, elle rentre en France où elle occupe depuis lors le poste de rabbin à la synagogue du Mouvement juif libéral de France (MJLF), dans le 15e arrondissement de Paris. Comme l'illustre son dernier essai, En tenue d'Eve (Grasset), elle milite pour que les religions reconsidèrent la place des femmes.