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20 septembre 2010 1 20 /09 /septembre /2010 22:24

alphonse_rachel_new.jpgGorze, septembre 2010

Chers Amis,

Chaque fois que l’on va en vacances, ne serait-ce que quelques jours, on fait une expérience biblique étrange, mais tout à fait fondamentale : on quitte tout, maison, travail, milieu de vie, habitudes, environnement, relations…etc ! Il est très important de ne pas laisser passer cette Grâce qui a frappé à notre porte…

La première parole que Dieu adresse au premier homme dans l’histoire datée, c’est à Abraham. Elle doit être importante au plus haut degré, comme toujours là où les choses commencent. Cette parole divine est une invitation à tout quitter, au dépouillement total : Abraham, quitte ton pays… (Gn 12, 1) Elle résonne à travers toute la Bible et vient se planter dans le cœur du jeune homme riche de l’Evangile auquel Jésus dit : Va et vends tout ce que tu as…(Mt 19, 21). Cet homme-là, c’est toi, c’est moi, c’est chacun d’entre nous ! Il n’y a pas de commencement pour personne sans être pauvre de tout. Dieu ne vient en nombre avec rien et tant qu’il y a une attache quelconque, fil à coudre ou grosse corde, disait Saint Jean de la Croix, peu importe, l’envol est impossible…L’homme ne se réalise pas.

La richesse n’est pas mauvaise en soi, elle est neutre comme toute chose. Mais c’est la mauvaise relation avec la richesse qui introduit dans l’homme une immense distraction, qui divise l’âme et la jette dans le multiple. C’est cette mauvaise relation qui fait que le riche est continuellement dis-trait, au sens étymologique : tiré dehors, désaxé, sans orientation intérieure, il est capté par le monde des choses, asphyxié par elles.

Il possède des choses, mais en réalité les choses le possèdent, il est possédé, son être étouffe et ne peut parvenir à maturité, comme Jésus le dit à propos des épis étouffés par les épines (Lc 8, 14). Mais n’oublions pas : on peut être richissime de sa pauvreté, la considérer comme un avoir… Ou encore être totalement enchaîné par ses désirs, le désir de ce que l’on n’a pas et tomber dans le ressentiment contre les riches. Cette haine-là est peut-être la plus grande des richesses, car il n’y a rien d’autre qui nous possède davantage. C’est un enfer et la jouissance qu’il procure est satanique…

Être pauvre, en esprit, c’est-à-dire jusqu’au tréfonds de soi-même, jusqu’au dépassement du petit moi, c’est libérer son désir pour le ré-unir à Dieu, comme à l’origine. Lors de la création première, en effet, Dieu a déposé dans l’homme un désir unique pour l’Unique Désiré qu’il est Lui-même ; mais coupé de Dieu par la Chute, l’homme cherche à satisfaire ce désir ailleurs, son désir s’atomise dans le multiple et quête dans les innombrables facettes du relatif une réponse à sa soif d’Absolu. Voilà pourquoi le désir est le puissant symbole de notre moi et le vrai baromètre de notre vie spirituelle. Tant qu’il n’est pas centré en Dieu seul, le désir est l’ennemi par excellence du Chemin. Il faut une extrême vigilance pour le débusquer sous toutes sortes de déguisements et le déceler derrière tous ses masques, constamment à l’affût de satisfactions obscures et de plaisirs. Lorsqu’il a perdu Dieu, l’homme éprouve un état de manque permanent.

Mais pour celui qui a compris par expérience, qu’au fond de chaque désir, jusqu’au moindre, il y a en réalité le désir de Dieu, celui-là peut devenir pauvre de tout le reste. Sa conscience se tourne vers la Présence divine qui est au creux de cet élan intérieur, et non plus vers les objets de sa convoitise. Un jour il sera possédé par Dieu au lieu d’être possédé par les choses. A la fin il retrouve l’unique désir qui rencontre Dieu à l’intérieur de tout, même des satisfactions et des plaisirs, mais ceux-ci seront alors des lieux d’alliance avec Lui, non plus des prisons de l’ego.

La pauvreté de cet homme peut devenir absolue. Elle se traduit concrètement par une égalité d’âme totale devant tous les résultats, toutes les réactions, toutes les circonstances : est-ce la bonne ou la mauvaise fortune, le respect ou l’insulte, la renommée ou le blâme, la victoire ou la défaite, la santé ou la maladie, les événements agréables ou pénibles… La seule chose qui compte pour lui, c’est ce que Dieu veut ici et maintenant. Il ne veut que ce que veut Dieu, à tout moment, et tout ce qui lui arrive il l’accepte indifféremment de sa main. La plus infime réaction de son cœur, face à ce qui arrive, est la preuve d’une non-pauvreté et d’un attachement à la vieille nature.

L’enjeu de la pauvreté c’est d’abord de devenir libre de tout, car cette liberté est le grand signe de la personne. Quand l’homme s’éveille à elle, il naît à lui-même, à son vrai mystère, son identité. C’est un immense lâcher prise ; un saut dans une confiance totale où un Autre que l’ego devient le guide conducteur de tout parce que le désir repose en Lui seul.

Dans cette descente, qui est un appauvrissement de soi continuel, tout vrai disciple doit pouvoir dire un jour : Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi (Ga 2, 19). Alors cette pauvreté-là se dévoile à lui comme étant la richesse en personne : Dieu.

Souhaitons-nous une « rentrée » dans cette nouvelle année avec la décision de non-attachement. Rien ni personne ne nous appartient…


Avec toute notre affection, à bientôt !

Père Alphonse et Rachel

 

http://www.centre-bethanie.org/

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