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Si tu vois s’effondrer ce corps qui est le tien
Et te trahir ces mains qui furent alliées,
Ou se sceller la langue hier aux cent refrains
Sans cesser de t’émerveiller ;
Si, sur ce long chemin que tu sais sans retour,
Si tu peux rendre grâce et pas rendre les armes,
Et, face à tes enfants, être enfant à ton tour
Dans la douleur et dans les larmes ;
Si tu vois que ta force est dans cette faiblesse
Et que, plus que les mots que tu ne sais plus dire,
Cette main dans ta main, en ultime caresse,
Est la seule chance à saisir ;
Si, toi qui as souvent tonné de mille orages,
De ton souffle coupé tu permets qu’en ce lit,
Passion, langueur de temps, aient raison de ta rage,
Pour apaiser chaque aujourd’hui ;
Si tu peux t’incliner comme, foulée, fait l’herbe
Et sur tes horizons mettre un point à la ligne,
Si tu sais délaisser tes désirs, ta superbe
Sans jamais cesser d’être digne ;
Si tu peux appeler victoire ta défaite
Et placer ton courage où certains ont l’orgueil,
Renonçant à ce que ta volonté soit faite
Comme on porte son propre deuil ;
Sache que, quant à moi, je me tiendrai tout près
Pour te donner à boire ou te parler encore ;
Pas par pitié : jamais ! simplement je saurai
Que c’est ainsi que je t’honore ;
N’écoute pas tous ceux qui ne verront en toi
Que l’épave brisée d’une vie en calvaire
Pour qui – vite ! – la mort serait le dernier droit :
Car tu es un homme, mon frère.
Edmond Prochain
http://edmondprochain.wordpress.com/2011/01/21/car-tu-es-un-homme-mon-frere/