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10 février 2009 2 10 /02 /février /2009 21:32
Tu l'as remarqué, Seigneur, ce bonhomme dans le désespoir qui est en train d'espérer ?
Ferme les yeux pour mieux m'entendre,
ne retiens pas Ta main qui s'en va toute seule à la recherche de mon âme.
Elargis-toi au-dessus de moi comme un arbre et comme une maison !
Un arbre pour que je l'étreigne à deux bras,
une maison pour que j'y dorme et pour que j'y mange !
Tout de même, à nous deux on s'en est tiré une fois de plus !
Entre Tes mains, Seigneur, je remets mon esprit :
Tu nous as rachetés, Seigneur, Dieu de vérité.
J'aime le vrai, je hais les riens, je hais le rien.
J'espère, j'aime, je crois, je suis soulevé de bonheur,
Tu m'as pris par la main comme quelqu'un qu'on va chercher !


EXTRAIT DU PSAUME 30, D'APRÈS PAUL CLAUDEL,
IN « PSAUMES. TRADUCTIONS1918-1953 » ©NRF-GALLIMARD
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9 février 2009 1 09 /02 /février /2009 23:22


«Tu ne peux devenir moine si tu ne deviens tout entier comme un feu qui se consume », a dit un Père du désert. Et, aux premiers siècles, ils ont été des centaines, voire des milliers, à s'exercer à cet art exigeant de la prière et de l'ascèse dans le désert égyptien.

Tu seras peut-être surpris d'apprendre que parmi ces solitaires, on trouvait quelques femmes. C'est l'une d'elles que je veux t'inviter aujourd'hui à écouter. Son nom est Anima Synclétique.

Elle provenait d'une famille noble et très riche, établie à Alexandrie d'Egypte au IVe siècle. Lorsque ses parents moururent, Synclétique se retira dans un lieu solitaire pour y pratiquer une vie d'une extrême austérité, dans la prière et le jeûne. Le jeûne lui était d'ailleurs si familier qu'elle le considérait comme le fondement de toute la vie spirituelle. On dit même que lorsqu'il lui arrivait de manger plus que d'ordinaire, paradoxalement, elle en devenait toute pâle et son corps se mettait à dépérir. Sa réputation attira de nombreuses jeunes femmes dans le désert : pour les former, elle préférait le silence et les larmes aux paroles. Mais certaines de ses sentences nous sont toutefois parvenues. Lorsqu'elle parlait, pour évoquer les réalités spirituelles, Synclétique s'exprimait toujours dans un langage imagé. Rares sont les paroles qui nous ont été transmises d'elle où il n'est question de navigation, de construction, d'entraînement athlétique...

Elle compare ainsi l'effort nécessaire à la rencontre avec Dieu, dans la vie spirituelle, à celui de l'allumage d'un feu : « Pour ceux qui s'avancent vers Dieu — affirme Amma Synclétique — il y a au commencement beaucoup de luttes et de peines, et ensuite une joie ineffable. En effet, comme ceux qui veulent allumer un feu sont d'abord dans la fumée et pleurent, et par ce moyen obtiennent ce qu'ils cherchaient, ainsi nous faut-il aussi allumer le feu divin avec des larmes et de la peine. »

Amma Synclétique fait bien sûr allusion au verset biblique où il est dit de Dieu qu'il « est un feu dévorant » (Dt4,24 ;He 12, 29). Mais avant de s'en laisser embraser, il faut beaucoup d'efforts, dit-elle. Car l'assiduité à la prière n'est pas facile : ta propre expérience te l'enseigne à toi aussi, cher ami !

Tant d'autres réalités nous semblent si souvent plus importantes et urgentes. Les choses n'étaient guère différentes pour les solitaires du désert égyptien : leurs apophtegmes sont, sur ce point, on ne peut plus clairs...

Oui, bien des difficultés nous font peiner, lorsqu'on veut se mettre à prier pour rencontrer Dieu sincèrement. Celle qui est le plus fréquemment évoquée aujourd'hui est le manque de temps. Et puis, il y a les distractions qui égarent notre esprit loin de Dieu. On peut mentionner encore l'impression d'aridité, ces moments où la prière n'éveille en nous aucune émotion. Enfin, la prière est parfois perçue comme une démission, une évasion, le contraire de Faction...

Tu pourrais sans doute citer encore d'autres obstacles qui entravent régulièrement ta vie de prière. Or, répond Amma Synclétique, ces épreuves son nécessairement présentes lorsqu'on veut s'approcher du Seigneur. Elles sont la fumée que dégage initialement le feu de l'amour de Dieu. On la traverse à force de persévérance ; mais ensuite, combien la flamme réchauffe et réconforte !

La prière n'est donc pas toujours naturelle ; mais à force d'endurance elle prendra une telle vigueur qu'elle «montera devant Dieu comme un feu» affirme un Père du désert. Elle pourra même te faire devenir toi-même « tout entier comme du feu ».

Et lorsque tu y seras parvenu, conclut Amma Synclétique, « de même que les drogues les plus acres expulsent les animaux venimeux, ainsi ta prière chassera ~t- elle les mauvaises pensées » qui s'opposent à elle.

Enzo Bianchi

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8 février 2009 7 08 /02 /février /2009 23:49

près d'une heure trente d'entretien

Par Jean-Maurice de Montrémy
Réalisation: Bruno Sourcis
France Culture

Professeur à la bouche d'or et formateur, par la khâgne de Louis-le-Grand, d'innombrables enseignants, docteur en théologie orthodoxe, maître à l'Institut Saint-Serge de Paris mais aussi bien invité de Jean-Paul II au Vatican, Olivier Clément avait 87 ans, à sa mort ce 15 janvier.

A Paris, on disait qu'il venait du Sud. Mais il est plusieurs Suds, de même qu'il y a d'autres soleils que celui de la volupté. L'Hérault viticole où naît le petit Olivier ne s'enivre pas à l'idéologie du Progrès: le radical-socialisme n'est qu'une forme qui fédère seulement les apparences. A l'enfant qui s'étonne que le vieux pont du jardin du Peyrou survive probablement à sa disparition à lui, le gamin de 7 ans, sa famille répond: "L'éternité, probablement"...Et à l'étudiant de 20 ans qui le trouve sur son chemin à l'Université de Montpellier, le grand maître es-questions que fut Alphonse Dupront confie :"L'homme, à la fin des fins, est structuré par des interrogations essentielles, la vie, l'amour, la mort ; ainsi entre-t-il en communion avec les autres, par un processus d'immanence, au moins aussi important que le processus de transcendance."


La vie, l'amour...Dans les années qui suivent, Olivier Clément se convertit deux fois. A une spiritualité fortement marquée de tantrisme d'abord, à l'orthodoxie ensuite,son havre définitif. A chaque fois, c'est un élan vital, rétif à tout moralisme qui l'entraîne.Les athées devraient comprendre, dit-il : eux-mêmes sont sans le savoir dans l'expérience mystique quand ils font l'amour ou qu'ils entrent dans le mystère du sommeil profond!
La découverte des vertus de la retraite viendra plus tard, au contact notamment du patriarche de Constantinople, Athenagoras: "Tout ce pour quoi ce grand éveque avait été élu échoua ; néammoins, comme c'était aussi un grand moine, il fit de sa faiblesse un exemple."

Bien des années après ces entretiens de 1995 que nous rediffusons et où sa parole est à son zenith, Olivier Clément fit à son tour l'expérience de l'amoindrissement.Confiné chez lui dans les hauts de Paris, il n'était plus le conférencier admiré, le passeur infatigable, encore moins le controversiste redouté: "J'ai renoncé à la polémique, j'ai même renoncé à penser contre".L'important, qu'il faut nommer et non dénoncer, c'est le monde qui abonde et dont tous les noms se résument en celui du Christ.

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