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28 décembre 2017 4 28 /12 /décembre /2017 23:54
La prière est une source

Béatrice Soltner - Frère Benoît , moine de l'abbaye Notre-Dame de Maylis

"Prier c'est avant tout contempler dans le silence." Pour Frère Benoit, moine à l'abbaye de Maylis, Dieu se révèle dans l'intériorité de notre cœur. Encore faut-il y demeurer...

Pour parler de la prière, on utilise parfois l’image du poisson qui pour vivre doit circuler dans l’eau, lui qui, hors de son milieu, n’a pas beaucoup de chance de s’en sortir.

Certes notre territoire n’est pas aquatique mais cette métaphore de l’océan peut nous parler à nous humains.

L’évangile de Jean utilise une autre image : celle du sarment qui, en dehors de la vigne se dessèche et fini au feu (chapitre 15).

À l'heure où beaucoup de nos contemporains sont en quête de spiritualité(s), redire que l'enjeu de la prière c'est de demeurer dans un environnement porteur, vivifiant, dynamisant.

C’est se relier à une source qui nous dépasse et en dehors de laquelle, comme dit Jésus, nous ne pouvons rien faire.

Prier c'est comtempler celui qui est la vie, le Christ, et qui n'a de cesse de nous rendre plus vivants.

"Il y a toujours un fond de foi chez tout le monde : si vous le mettez en acte cela vous rapproche de Dieu"

Écouter

 
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COMMENT PRIER ?
"Nous ne savons pas prier comme il faut" dit saint Paul, "l'Esprit lui-même intercède pour nous par des gémissements inexprimables."* (Rm 8, 26) Et puis il y a toute une tradition de prière
 qui nous précède et sur laquelle on peut s'appuyer. Frère Benoît entré à l'abbaye Notre-Dame de Maylis
 guidé par le désir de prier, que Dieu soit à la première place. "Alors que dans la société il est relégué à la dernière place si on lui laisse une place." Ses journées sont rythmées par la prière. Avec un attachement particulier aux Psaumes. "J'avais le grand désir de passer ma vie à prier avec les Psaumes
", des textes où il "trouve ce qu'[il veut] dire à Dieu" mieux qu'avec ses propres mots. Parce qu'il y a des mots qui aident à prier.

QU'EST-CE QUE LA PRIÈRE ?
Prier, c'est d'abord répondre à un appel que Dieu lance inlassablement. Dans la parabole de Luc, il est question d'un ami qui dérange un autre ami au cœur de la nuit. Cet homme qui nous réveille, c'est Dieu, dit Fr Benoît. "C'est Dieu qui essaie constamment de réveiller l'humanité ; c'est Dieu qui conduit à la prière et qui invite fortement à la prière."
 
"Jésus leur dit encore : « Imaginez que l’un de vous ait un ami et aille le trouver au milieu de la nuit pour lui demander : "Mon ami, prête-moi trois pains, car un de mes amis est arrivé de voyage chez moi, et je n’ai rien à lui offrir." Et si, de l’intérieur, l’autre lui répond : "Ne viens pas m’importuner ! La porte est déjà fermée ; mes enfants et moi, nous sommes couchés. Je ne puis pas me lever pour te donner quelque chose." Eh bien ! je vous le dis : même s’il ne se lève pas pour donner par amitié, il se lèvera à cause du sans-gêne de cet ami, et il lui donnera tout ce qu’il lui faut. Moi, je vous dis : Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira." (Lc 11, 5-10)*

LA PRIÈRE, UN ACTE DE FOI
"La prière c'est l'acte premier de la foi." Si on y réfléchit, il est étonnant de constater que dans le Nouveau Testament, Jésus ne critique jamais les apôtres pour leur manque d'amour mais pour leur manque de foi ! "Le premier lien avec Dieu c'est la foi, c'est ça surtout qu'il faut protéger, après l'amour viendra."

FAUT-IL AVOIR LA FOI POUR PRIER?
"Je crois qu'il faut avoir la foi pour prier, sinon vous parlez dans le vide." Mais chez certains la foi est plus explicite que chez d'autres. "Si votre enfant a un accident, forcément vous allez prier, que vous soyez croyant ou incroyant", a-t-on dit un jour à Fr Benoît. "Il y a toujours un fond de foi chez tout le monde : si vous le mettez en acte cela vous rapproche de Dieu." Car l'acte de foi qu'est la prière permet "une rencontre avec quelqu'un de vivant".

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27 décembre 2017 3 27 /12 /décembre /2017 23:52
14 fonctions pour analyser les religions d'un point de vue sociologique
De quelques fonctions assumées par les religions

Nous allons dresser succinctement la liste de ces fonctions, sans chercher à en approfondir la description. (...)

Une première fonction est la fonction séparatrice, qui produit la différence entre le sacré et le profane. C’est, selon Durkheim, la propriété fondamentale de toute religion, quelle que soit la façon dont se définit, ici ou là, le sacré.

Une deuxième fonction est ce que l’anthropologue Philippe Descola – convaincu lui aussi du caractère insatisfaisant de toute définition a priori de la religion, fût-elle de Durkheim, de Mauss ou de Dumézil (Descola, 2008 : 78) – nomme la fonction figurationnelle, qu’il définit comme « l’instauration publique d’une qualité ontologique invisible par un énoncé, une prophétie, une image » (Descola, 2008 : 82). Ces « invisibles instaurables  » se répartissent en trois classes : les « esprits », les « divinités » et les « antécédents », eux-mêmes divisés en « ancêtres » et en « totems » (Descola, 2008 : 85). Voilà qui place sur le même plan le texte et l’image religieuse, dans leur fonction de support des représentations, objectivant ce qu’on appelle la croyance.

Une troisième fonction est la fonction rituelle, qui fait accomplir des gestes, plus ou moins individuels ou collectifs, et plus ou moins formalisés – de la prière à la cérémonie ou au pèlerinage. Il existe bien sûr des rites profanes – pensons à la célébration de l’anniversaire – mais il semble difficile de concevoir des religions sans rituels. Cette fonction rituelle est particulièrement importante dans la religion juive. Notons que ces trois premières fonctions – séparatrice, figurationnelle, rituelle – recoupent les trois traits principaux que le sociologue Albert Piette attribue non seulement aux religions instituées mais aussi aux « religiosités séculières », en proposant de définir celles-ci par une « sacralisation » de personnes, d’idées ou d’objets, par la représentation d’une réalité transcendante (surnaturelle), et par un ensemble « rituel » spécifique (Piette, 1993 ; 1997 ; 2003).

Une quatrième fonction est la fonction sotériologique, par laquelle la pratique religieuse est supposée assurer le salut, quel qu’en soit la forme – de même d’ailleurs que les pratiques magiques. La question reste ouverte de savoir s’il existe des religions sans visée sotériologique.

Une cinquième fonction est la fonction thaumaturgique, en vertu de laquelle la croyance religieuse donne consistance à des événements surnaturels, que la religion catholique nomme des « miracles », interprétés comme des signes de l’invisible. Eux aussi peuvent relever de pratiques magiques. Ils ne semblent pas présents dans toutes les religions.

Une sixième fonction est la fonction cultuelle, qui pousse à ritualiser, à formaliser dans l’espace et dans le temps, les marques de déférence voire de dévotion envers un être supérieur. Celui-ci peut être un dieu ou un esprit, du côté des « invisibles », ou encore un « antécédent », s’agissant d’un ancêtre, mais aussi une idole profane, telles les célébrités adorées par leurs fans (Heinich, 2012). C’est dire que cette fonction, quoique probablement présente dans toutes les religions, ne leur est pas spécifique.

Une septième fonction est la fonction sacrificielle, qui soumet la recherche de salut à une forme de privation, quelle qu’elle soit – de la privation d’un objet précieux à la privation de sa propre vie dans le cas du martyre ou encore, moins radicalement, la privation de nourriture (ramadan) ou de certains mets (cascheroute, carême). Notons toutefois que toutes sortes de pratiques superstitieuses possèdent une dimension sacrificielle, au-delà des domaines catégorisés comme religieux.

Une huitième fonction est la fonction mystique, qui favorise les états où le sujet se sent mis en relation avec une transcendance, quelle qu’en soit la forme – transes, crises mystiques, « sentiment océanique », etc. L’on pourrait faire remonter cette fonction dans la liste en arguant de son caractère récurrent dans la plupart des religions, si nombre de témoignages n’attestaient l’existence d’états mystiques non associés à des références religieuses, notamment dans l’expérience esthétique et dans le contact avec la nature, comme l’a bien montré Jean-Claude Bologne à propos du « mysticisme athée » (Bologne 1995).

Une neuvième fonction est la fonction charismatique, qui attribue à certains individus une capacité hors du commun d’attirer l’admiration ou d’exercer une influence, par l’effet d’une « grâce » plutôt que par le produit d’un travail ou d’un mérite. Cette fonction, comme celles qui vont suivre, a pu trouver des réalisations spectaculaires dans le domaine religieux (notamment avec la figure du prophète) mais n’en est nullement spécifique, puisqu’on la rencontre dans bien d’autres domaines (politique, sportif, artistique etc.), et ce de plus en plus puisque, selon Danièle Hervieu-Léger, la « dimension » – selon ses termes – charismatique des religions se déplace dans la société moderne, caractérisée par une « poussée charismatique » en relation avec les médias (Hervieu-Léger, 1987).

Une dixième fonction est la fonction communautaire, par laquelle le partage d’une même religion crée des communautés d’appartenance. Là encore, c’est un trait probablement constitutif de toute religion, mais qui est loin de se limiter à leur sphère, comme en témoignent notamment les fortes affiliations patriotiques ou sportives.

Une onzième fonction est la fonction éthique, en vertu de laquelle ce sont les religions qui édictent les règles morales, transmises par l’apprentissage des textes sacrés. Cette moralisation du rôle de la religion, sans doute plus poussée dans les religions monothéistes, n’en est toutefois pas constitutive, comme en témoigne l’existence de « morales laïques ».

Une douzième fonction est la fonction culturelle, qui pousse à la création de supports artistiques à la dévotion – images mais aussi musiques, danses, poèmes… Si la création artistique dans le monde occidental a été fortement associée, à l’origine, aux pratiques religieuses, elle s’en est de plus en plus émancipée, au point que le lien entre les deux a pratiquement disparu aujourd’hui. C’est dire que cette fonction culturelle n’est pas plus spécifiquement religieuse que ne le sont les fonctions charismatique, communautaire ou éthique – où l’on retrouve les quatre « dimensions » de la religion mises en exergue par Hervieu-Léger (Hervieu-Léger, 1993).

Une treizième fonction est la fonction institutionnelle, consistant en la création d’institutions propres à encadrer, soutenir, stabiliser, officialiser les pratiques religieuses, et représenter les pratiquants. L’on sait le rôle fondamental de cette fonction dans la distinction entre religion et magie, mais toutes les religions n’ont pas engendré des institutions, de même que, inversement, toutes les institutions ne sont pas, loin de là, d’ordre religieux. C’est donc là une fonction très « hétéronome », présente dans certaines religions mais peu spécifique.

Il en va de même enfin avec la quatorzième et dernière fonction : la fonction politique, qui assigne à une religion un rôle dans la conduite des affaires publiques. En France la religion catholique a longtemps assumé cette fonction – de façon plus ou moins affirmée – jusqu’à la Révolution puis la loi de 1905 sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat. D’autres sociétés à prédominance chrétienne, en revanche, maintiennent active cette fonction politique de la religion, tandis que les sociétés à prédominance musulmane lui confèrent une place centrale dans l’exercice du pouvoir.

(...)

une analyse fonctionnelle des religiosités actuelles

Il devient dès lors possible de déplacer la question du « retour du religieux » vers un questionnement précis du type de fonctions activées par les formes actuelles de référence aux religions dans l’espace public. Pour s’en tenir à la société française, elles sont essentiellement de deux sortes : d’une part, les manifestations publiques d’adhésion aux valeurs du catholicisme en réaction aux réformes du droit de la famille (mariage homosexuel, procréation médicalement assistée, gestation pour autrui) ; d’autre part, les manifestations publiques, parfois accompagnées de violences, d’adhésion et de prosélytisme en faveur de l’islam. L’on peut y ajouter dans certains pays – notamment latino-américains – les manifestations, publiques mais dans des lieux dédiés, d’adhésion au protestantisme évangélique.

Dans le premier cas, il en va à l’évidence d’une mobilisation de la fonction éthique, soit par l’institution catholique (mais dans un contexte où sa fonction politique est considérablement réduite), soit par les catholiques eux-mêmes, qui prennent le relais des autorités religieuses pour réaffirmer publiquement les valeurs auxquelles ils sont attachés, notamment en termes de morale sexuelle et de familialisme traditionnel. La cause en est patente : c’est la libéralisation des mœurs et sa légitimation par les institutions politiques qui provoque en réaction ce retour au cadre catholique. Comme souvent donc en matière de valeurs, l’expression publique de l’indignation n’est pas le signe d’une régression vers un stade normatif antérieur mais, bien au contraire, d’une évolution, donnant lieu à des oppositions ponctuelles mais peu efficientes.

Dans le second cas – montée en visibilité de l’islam, et montée en puissance de l’islamisme –, nous assistons à une mobilisation d’au moins trois fonctions : la fonction politique, avec la prétention d’une religion à régir l’ensemble de la société ; la fonction communautaire, avec la réaffirmation – ou la revendication, selon – de l’appartenance de tous les musulmans à une même communauté religieuse, soudée autour d’un certain nombre de règles, et notamment de l’interdit de représentation du prophète ; et la fonction sacrificielle, qui pousse certains musulmans fanatisés à sacrifier leur vie dans des attentats terroristes. Nul doute que dans d’autres contextes, ce seraient d’autres fonctions qui pourraient prendre le pas dans l’exercice de la religion musulmane, comme le réclament d’ailleurs certains de ses membres : par exemple la fonction rituelle de la prière, la fonction éthique d’adhésion aux valeurs de tolérance, ou la fonction mystique que constitue l’épreuve individuelle de la relation avec une transcendance. Il faudrait bien sûr pouvoir expliquer l’activation de certaines de ces fonctions, plutôt que d’autres, par le contexte social, politique, économique, international – mais ce n’est pas le lieu ici.

Enfin, concernant les assemblées évangéliques, l’on y voit à l’œuvre, très nettement, la fonction communautaire de rassemblement des fidèles, associée à la fonction mystique de production d’états de transe ou de fusion collective, à la fonction charismatique de soumission au pouvoir d’un être capable de déplacer des foules, et à la fonction rituelle du rassemblement et de la prière collective. Notons en revanche la place relativement faible qu’y tiennent les fonctions séparatrice et figurationnelle, ainsi que les fonctions institutionnelle et politique.

Au terme de cette analyse fonctionnelle, la conclusion s’impose : nous n’avons pas affaire à un « retour du religieux », mais à la montée en puissance ou en visibilité de certaines fonctions, plus ou moins assumées par certaines religions, en réaction aux évolutions des sociétés occidentales actuelles.

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26 décembre 2017 2 26 /12 /décembre /2017 23:57
Une chorale musulmane qui chante Noël dans une église au Liban

Alors qu’au Liban, malgré les nombreuses guerres qui l’ont déchiré et les différentes occupations étrangères qu’il a subit, la coexistence s’est accommodée d’une relative démocratie et d’une liberté qui n’existe dans aucun autre pays arabe.

La diversité et la tolérance inter religieuses n’y sont pas factices, elles sont existentielles.

Sans ses chrétiens, sans ses musulmans, sans ses dix-huit communautés religieuses, le Liban ne serait tout simplement pas le Liban.

La chorale des orphelines de la Fondation de l’Imam Moussa al-Sadr venue chanter Noel à l’église Saint-Elie de Beyrouth en est la parfaite illustration.

Ce spectacle, a priori anodin, peut représenter un exemple à suivre pour les autres pays, notamment en Europe, où malgré les vaines tentatives de formatage artificiel des esprits, les uns et les autres vivent dans une méfiance réciproque sans cesse grandissante. 

Abolir les fêtes religieuses, comme certains rêvent de le faire, en France ou ailleurs, est une aberration.

Ces fêtes, il faut les célébrer toutes, et il faut les célébrer tous ensemble.

Pour que les uns et les autres apprennent les croyances et les traditions des uns et des autres.

En n’oubliant jamais les règles premières de l’hospitalité : l’hôte ne demande jamais à son invité de renier qui il est, et l’invité respecte en tous points les règles et les particularités de son hôte.

Claude El Khal

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