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20 février 2011 7 20 /02 /février /2011 21:22

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  Chers Amis,


Dans l’épaisse grisaille de ce mois de février, n’oublions pas sa pointe d’humour et d’amour : la fête de la saint Valentin ! Une ombre forte cache toujours un soleil brûlant… C’est celui de l’Amour partout présent et qui remplit tout ! L’occasion est unique pour publier notre livre : « La mystique du couple », en germination depuis que Rachel et Alphonse s’aiment…cela fait quarante ans ! Il vient de paraître aux éditions Lethielleux (Paris).

 

Nous vous en offrons en prémices ces quelques lignes :


Ce qu’est l’amour au sein d’un couple, personne ne l’a encore dit et sans doute ne le fera-t-on jamais… Ce n’est pas un objet sur lequel on disserte, mais une expérience dans laquelle on entre. Seul celui qui en prend le Chemin peut descendre dans l’abîme de son mystère, mais celui-là se taira. S’il risque une parole, même s’il la porte à la limite de l’indicible, par exemple par le chant ou le poème, jamais il ne lui sera possible de dévoiler l’essence de l’amour mais seulement son rayonnement.


Ce rayonnement lui-même est d’étrange sorte, il n’a pas les caractéristiques de la lumière d’ici-bas. La mystique juive dit que l’autre, dans le couple, c’est la Shekhina, la gloire de Dieu. Le regard contemplatif voit alors au-delà des apparences de l’autre, toujours passible de nos jugements, la présence du Tout-Autre. L’amour illumine le cœur de l’être aimé et cette révélation ouvre à une connaissance jamais achevée. « Connaître », au sens biblique, est en effet synonyme de naître à l’autre, lui devenir intérieur, l’épouser et tirer de son innocence originelle l’inédit et le jamais vu, la Beauté inaccessible à la concupiscence de l’éros ou au romantisme si éphémère. Là est le vrai visage de l’autre, son visage d’éternité. Devenir assez transparent pour communier à cette profondeur où on découvre la secrète convivialité de l’autre avec Dieu, sa source la plus intérieure, c’est le tout de l’ascèse au sein d’un couple.


Si la reconnaissance (connaître et jubiler) du vrai visage de l’être aimé a une répercussion aussi inouïe sur celui qui le contemple, on ne parle pas pour rien d’un coup de foudre, c’est parce qu’il provoque soudain un face-à-face où chacun est révélé à lui-même au cœur de la Source commune. Cela personne d’autre ne peut le voir, c’est précisément le poids de gloire que portent en eux les initiés de l’amour.


Mais s’il n’y a pas, sous-jacent, le dur labeur de l’ascèse, la vision s’efface, engloutie par l’usure du temps, l’ennemi mortel du quotidien, le rejet à la surface de la face des profondeurs profanées par la banalisation. Celle-ci n’a pas de limites et le risque du mariage sans chemin spirituel, c’est d’ouvrir le gouffre infernal de la destruction réciproque. A regarder les couples, on n’a pas de mal à s’accorder rapidement sur ce point… L’enfer est devenu leur pain quotidien, un « sérieux déplorable » les a définitivement castrés. Soren Kierkegaard, ce grand philosophe du siècle dernier, pensait que le mariage était un assoupissement de mort. Par l’amour d’une jeune fille, dit-il, on devient génie, héros, poète ou saint, mais par le mariage d’une femme on devient conseiller de commerce, général, père de famille… Le roi de Mésopotamie s’est marié et maintenant il est épicier à Copenhague.


La grâce du sacrement de mariage relève justement ce défi-là : par elle l’épicier de Copenhague garde non seulement sa royauté, mais il en découvre son infinie majesté. La femme, elle, ne garde pas une beauté de jeune fille, très vite flétrie, mais s’achemine vers la virginisation de son être et naît à l’éternelle jeunesse, lieu de toute fécondité, que l’on soit poète ou conseiller de commerce !


Le but de l’homme n’est pas de devenir génie ou héros « par la grâce d’une jeune fille », mais de devenir dieu par un co-être avec la femme. Dès l’origine, Dieu crée l’Homme dans une consubstantialité conjugale, homme et femme, une seule chair, pour être à Son image. C’est la tentation démoniaque qui a introduit la scission. Maintenant, depuis la chute, le sens du couple c’est de redevenir une seule chair, une nature en deux personnes, comme Dieu est une nature en trois personnes. Cette union des deux époux jusqu’à la ressemblance avec Dieu fait que leur chemin est un témoignage vivant de la gloire divine. Leur amour est un rayonnement de cette gloire (Jn 17,22-23), une théophanie, manifestation de Dieu, car que deux ou trois, en effet, soient réunis en mon nom, je suis là au milieu d’eux (Mt 18,20).


Le « milieu », c’est la relation des amoureux, dans l’intimité des deux la présence du grand Troisième. Quand le couple est sans amour et sans chemin spirituel, la relation est un vide dans lequel la chute originelle se réitère sans cesse, géhenne de leurs défaillances, chambre des tortures réciproques. Mais dès que, par la prière et l’amour, la Grâce s’active, la relation c’est Quelqu’un au « milieu » des deux, mais aussi au « milieu » du cœur de chacun. Aimer, c’est donner son cœur, mais c’est donc aussi en même temps donner Dieu l’un à l’autre. Ce n’est qu’à ce contact brûlant que les poisons et le fiel de la condition infrahumaine et si souvent bestiale du vieil homme sont progressivement évacués.


L’amour devient alors un chant secret qui liturgise toute la vie des amants : tout dans leur vie est sacrement, cela veut dire que le Christ est présent et s’exprime dans tout geste, dans le regard de l’un vers l’autre, le sourire, la parole, une caresse…


En somme le couple, puisqu’il est à l’image de Dieu, apprend à tout homme, qu’il soit célibataire ou marié, la seule manière de vivre en plénitude : découvrir et épouser le Féminin de son être intérieur. Le mariage en est un Chemin, le célibat en est un autre. A chacun sa vocation pour exprimer sa vérité la plus profonde : les épousailles mystiques.


Avec toute notre affection, à bientôt !

Père Alphonse et Rachel

 

http://www.centre-bethanie.org

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19 février 2011 6 19 /02 /février /2011 23:40

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L’Histoire du christianisme avec Jean-Robert Armogathe

Jean-Robert Armogathe, Prêtre de Paris, il enseigne « l'histoire des idées scientifiques et religieuses dans l'Europe moderne » à la Sorbonne. Il est auteur de nombreux ouvrages sur la philosophie et l'histoire religieuse des 16è-17è siècles et il vient de diriger une « Histoire générale du christianisme » : 2 épais volumes de 3000 pages et 80 collaborateurs, aux Presses Universitaires de France.

 MUSIQUE :

- Vêpres à la Vierge en Chine, choeur du Breitang dirigé parJ-Chr Frisch. K617155

- Olivier Messiaen, Le livre d'orgue, dans l'interprétation d'Olivier Latry (Dans le totum de Latry)

- Arvo Paït, messe cyrillique par l'ensemble Kronos Quartet

 
LECTURE :

Chateaubriand, Le génie du Christianisme, livre 6

Claudel, Le soulier de satin, ouverture
   

"Les racines du ciel" est une émission de France Culture consacrée à la spiritualité.
 
Chaque semaine Frédéric Lenoir reçoit un invité autour d'une grande thématique spirituelle (le silence, la compassion, le désir, l'éternité...) ou d'une problématique religieuse concrète (le Mont Athos, la femme dans le christianisme, la méditation bouddhiste...).

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18 février 2011 5 18 /02 /février /2011 23:05

 

L’eucharistie c’est l’Église qui entre dans la joie de son Maître. Entrer dans cette joie comme en être le témoin dans le monde est, en vérité, l’appel même adressé à l’Église, sa leitourgia essentielle, le sacrement par lequel " elle devient ce qu’elle est ".

La meilleure façon de comprendre la liturgie eucharistique est de la regarder comme une route ou une procession. C’est la route par où l’Église entre dans la dimension du Royaume. Nous employons ce mot " dimension " parce qu’il semble le meilleur pour indiquer le comment de notre entrée sacramentelle dans la vie ressuscitée du Christ.

Notre entrée dans la présence du Christ est une entrée dans une quatrième dimension qui nous permet de pressentir l’ultime réalité de la vie. Ce n’est pas une évasion du monde. C’est plutôt l’arrivée à un point privilégié d’où notre vue peut plonger plus profondément dans la réalité du monde.
(...)
Nous savons que nous avons été créés comme célébrants du sacrement de la vie, pour la transformer en vie en Dieu, en communion avec Dieu. Nous savons que la vie réelle est " eucharistique ", mouvement d’amour et d’adoration vers Dieu, mouvement qui seul peut révéler, accomplir en plénitude, valoriser tout ce qui existe et lui donner sens. Nous savons que nous avons perdu cette vie eucharistique et, finalement, nous savons que dans le Christ, le nouvel Adam, l’homme parfait, cette vie eucharistique a été redonnée à l’homme. Car il a été, dans sa personne, l’eucharistie parfaite. Il s’est offert lui-même à Dieu dans la plénitude de l’obéissance, de l’amour, de l’action de grâces. C’est Dieu qui était le cœur de sa vie. Il nous a donné cette vie parfaitement eucharistique. En lui Dieu est devenu notre vie.

Ainsi, cette offrande du pain et du vin à Dieu, nourriture que nous devons manger pour vivre, est offrande de nous-même, de notre vie et du monde entier au Seigneur. " Prendre en nos mains le monde entier comme on prendrait une pomme ", a dit un poète russe. C’est notre eucharistie. C’est le geste qu’Adam n’a pas su faire ; et dans le Christ il est devenu la vie même de l’homme. Geste d’adoration et de louange dans lequel toute joie et toute souffrance, toute beauté et toute frustration, toute faim et tout épanouissement, s’orientent vers leur fin ultime et deviennent, finalement, signifiants.
(...)
La liturgie nous a introduits dans l’eucharistie universelle du Christ ; elle nous a révélé que la seule eucharistie, la seule offrande du monde, c’est le Christ. Nous venons et revenons avec nos vies à offrir. Nous apportons et " sacrifions " - c’est-à-dire, donnons à Dieu - ce qu’Il nous a donné ; et chaque fois nous arrivons à la fin de tous les sacrifices, de toutes les offrandes, de toute eucharistie, parce qu’à chaque fois nous est révélé que le Christ a offert tout ce qui existe, et que lui et tout ce qui existe a été offert dans son offrande de lui-même. Nous sommes compris dans l’eucharistie du Christ et le Christ est notre eucharistie.
(...)
La substance de l’eucharistie est l’amour et ce n’est que par l’amour que nous pouvons y entrer et y participer. Cet amour, nous en sommes bien incapables. Cet amour nous l’avons perdu. Cet amour, le Christ nous l’a donné et ce don est l’Église. L’Église s’édifie par l’amour et sur l’amour, et, en ce monde, elle a à " témoigner " de l’amour, à le re-présenter, à faire de l’amour une présence? L’amour seul crée et transfigure : c’est pourquoi il est le " principe " même du sacrement.
(...)
Nous avons offert le pain en mémoire du Christ, parce que nous savons que le Christ est la Vie, et que toute nourriture doit, par conséquent, nous conduire à lui. Et maintenant, quand nous recevons ce pain de ses mains, nous savons qu’il a assumé toute vie, l’a emplie de lui-même, en a fait ce qu’elle devait être : communion avec Dieu, sacrement de sa présence et de son amour. Là, et seulement là, nous pouvons confesser avec saint Basile que " ce pain est véritablement le corps précieux de notre Seigneur, ce vin le sang précieux du Christ ". Ce qui, ici en ce monde, est surnaturel, se révèle là comme naturel.
(...)
L’Église n’est pas une société de gens qui s’évadent (tout seuls ou en groupe) de ce monde pour savourer le bonheur mystique de l’éternité. La communion n’est pas une " expérience mystique ". C’est à la coupe du Christ que nous buvons, et il s’est donné lui-même pour la vie du monde. Le pain sur la patène, le vin dans le calice, sont là pour nous rappeler l’incarnation du Fils de Dieu, la croix et la mort. Ainsi c’est la joie même du royaume qui nous fait nous souvenir du monde et prier pour lui. C’est la communion en vérité avec l’Esprit Saint qui nous rend capables d’aimer le monde, comme le Christ l’a aimé. L’eucharistie est le sacrement de l’unité et le moment de la vérité. Là nous voyons le monde dans le Christ, comme il est réellement, et non selon nos points de vue personnels, qui sont limités et partiaux. C’est là que commence l’intercession, dans la gloire du banquet messianique, et c’est là seulement que commence, en vérité, la mission de l’Église.

Extraits du livre
du père Alexandre Schmemann,
Pour la vie du monde, Desclée, 1969.

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