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27 mars 2022 7 27 /03 /mars /2022 19:30
Lettre de Monseigneur Martin sur la guerre en Ukraine

 

Chers pères,
Chers frères et sœurs en Christ,
En ce temps de mi-carême, la guerre fait rage en Ukraine, aux confins de l’Europe...
Comme elle continue à embraser des régions entières à travers de multiples conflits inter-ethniques ou inter-religieux en de nombreux endroits du monde...
Avec toujours les mêmes exactions, la même violence meurtrière, les villes ou villages encerclés et bombardés et les populations jetées sur les routes de l’exil par la folie des hommes.
Comme beaucoup d’instances officielles en Occident, nous condamnons clairement et fermement l’invasion de l’Ukraine fomentée par les autorités politiques et religieuses russes, comme nous condamnons, au Nom de l’Evangile, toutes les formes de violence qui attentent aux droits fondamentaux de l’être humain en aliénant sa vie, sa liberté et sa dignité.
Et, dans ce positionnement, nous distinguons bien les intentions des gouvernements à la solde de forces ténébreuses et d’Eglises inféodées et empêtrées dans les affaires du monde, de celles des populations qui, assiégées, militent courageusement pour la cessation de tout conflit armé...
A travers ces drames, c’est d’abord et avant tout le cœur de toutes les familles en exode qui est douloureusement touché, cœur que nous avons le devoir d’Amour de soutenir non seulement par la prière mais aussi par des actions concrètes d’aide humanitaire et d’accueil inconditionnel...
Mais c’est aussi le cœur de millions d’hommes et de femmes solidaires qui saigne face au scandale du mal.
Comment ne pas pleurer devant tant de souffrance ?
Et comment ne pas entrer dans la colère de l’Amour devant tant d’ignorance ?
Pourtant au-delà de figures médiatiques politiques et religieuses qui prétendent imposer leurs mauvais souffles au cours de l’Histoire, il y aurait surtout à s’insurger contre d’autres forces à l’œuvre et s’engager fermement dans la guerre essentielle à évoquer en ce temps de Carême sur le monde...
Nous faisons particulièrement référence à l’actualité brûlante d’un texte biblique comme celui du livre de l’Apocalypse où, selon le théologien orthodoxe russe, le père Alexandre Men, « Dieu nous révèle, dans la fin du cycle que nous vivons, ce qui s’accomplit dans les profondeurs de l’Histoire et quelles forces gouvernent le monde... » (« Au fil de l’Apocalypse » aux éditions du Cerf)
N’oublions pas, en effet, que derrière les individus et les diverses organisations concernés sont à l’œuvre de grandes forces spirituelles et angéliques, forces résurrectionnelles au service du Christ ou forces diaboliques au service du Satan.
Le texte nous rappelle sans ambages que ce qui se passe ici-bas est la partie émergée d’un combat invisible, titanesque, qui se déroule dans les entrailles de notre histoire personnelle et collective : lutte entre Dieu et Ses anges d’un côté et, Satan et ses anges, de l’autre côté.
Toute l’histoire des hommes, du monde, de l’Église est sous-tendue par cette opposition irréductible entre le Royaume de Dieu et le royaume de Satan. Et toutes les guerres extérieures et intérieures à chaque être humain sont la manifestation de ce combat souterrain entre le Dragon et l’Agneau...
De ce combat, précise l’auteur contemporain Michel Maxime Egger dans le même ouvrage, l’Apocalypse nous révèle déjà l’issue : la victoire du Christ qui inaugure le triomphe du Royaume de Dieu sur la terre.
Sa Mort sur la Croix et Sa Résurrection proclament avec force que ce n’est pas la mort, le malheur, la maladie, la bêtise qui auront le dernier mot mais la force invincible de l’humble Amour...
En d’autres termes et de manière plus intérieure, la « guerre sainte» dont parlent les Écritures est l’exigeant combat de l’être humain avec lui-même et toutes ses tendances égoïstes, violentes, voraces (Dragon) qu’il lui faut désormais transformer et retourner en lumière dans une profonde volonté de guérir et de convertir son cœur dans la présence du Christ (Agneau), Médecin des âmes et des corps et de l’Esprit-Saint...
Chaos ou harmonie extérieurs sont les reflets douloureux ou paisibles de notre monde intérieur... C’est dans ce cadre que nous mesurons l’actualité et la force des paroles du saint évêque Jean de Saint Denis – Eugraph Kovalevsky – prononcées à l’occasion d’une homélie en mars 1960, « sur la vraie guerre ».
« L’Eglise, en ce temps de mi-Carême, propose son enseignement de la vraie guerre : la guerre spirituelle. Vous le savez, la cause des combats entre les peuples, des difficultés dans les familles ou entre proches, des disputes [...], c’est parce que l’on ne fait pas la guerre essentielle.
Celui qui lutte contre le démon apporte la paix ; celui qui chôme, qui est déserteur, nonchalant, non-engagé dans la lutte spirituelle intérieure, qui a oublié le combat du Christ et de Satan, provoque inévitablement, même s’il est pacifique, tout mou, « je m’en fichiste», ou réfugié dans son petit coin, la guerre extérieure. [...]
Mes amis, si l’essentiel n’est pas réalisé, cela se reflète implacablement à l’extérieur.
Je dirais plus : si vous demeurez et luttez avec le Christ, contre le diable, comment pourrez-vous – admettons - être jaloux ou haïr un autre ? Vous n’en aurez pas le temps. Dans la victoire en Christ, les images, les grimaces, les caricatures que sont les guerres extérieures perdent toute leur force.
Ne pensez-pas alors que les guerres soient introduites seulement par des accapareurs ou des tueurs ; elles sont souvent amenées par des pacifistes, les désireux du repos dominical, par ceux qui vivent pour l’argent, le plaisir – ou n’importe quoi d’autre – ou par désir même d’avoir la paix.
La paix vraie est le fruit de l’effort perpétuel en Christ, contre le mal qui est en nous-mêmes...
[...] Un vrai soldat entreprenant la bataille contre le mal, avec le Christ, pour le Christ, en Christ, devra tout d’abord être bien armé et bien défendu, avoir un casque sur la tête, un habillement tel qu’il ne pourra pas être atteint par des mitraillettes ou autres instruments meurtriers.
Comment se défendra-t-il ? Avec la prompte acquisition de l’impassibilité et de la tranquillité ; car si l’offense trouble, si une simple puissance ou quelque chose du dehors seulement injuste ou faux, enlève la capacité de combattre, vous êtes déjà le blessé, la proie de l’adversaire.
Même si l’on ne vous attaque pas personnellement, mais que l’on touche à ce qui est sacré pour vous, admettons blasphémer la Vierge, le Christ, votre religion, votre idéal ou votre mère, si vous êtes indigné, vous n’êtes plus un soldat.
[...] Ayant acquis cette impassibilité, la première chose indiquée par le Seigneur est la confession de la puissance divine. Ensuite, Il dira, afin de fortifier les pensées : ‘si celui qui vient lutter avec Moi, est plus fort que l’adversaire, il est victorieux.’
Que signifie, plus fort ? C’est Lui, le Christ.
Et qui est plus faible devant le Christ ? Satan.
La deuxième partie de l’attaque est que, sans le Christ, nous sommes plus faibles que Satan mais avec Lui, nous sommes forts. Le Christ a déjà gagné la bataille. Nous devons continuer cette bataille, considérant toujours que Sa Force est supérieure à toute forme d’attaque.
Je voudrais que chaque âme retienne et se pénètre de cette pensée sainte : voulez-vous être bienheureux dans votre âme ? N’abandonnez jamais le combat en Christ, contre Satan ; ce combat perpétuel qui doit aller jusqu’à votre dernier souffle vous donnera l’acquisition de la paix, mais aussi la puissance joyeuse. Le Carême, c’est cela.
Aimez même, je dirais, la lutte plutôt que la victoire, laissez la victoire au Christ, honorez-Le comme notre chef d’armée, aimez surtout être soldat.
Combien c’est étrange : un homme qui cultive continuellement la lutte intérieure conquiert la Paix ; l’homme qui cherche la paix extérieurement a son âme déchirée et pleine d’angoisse.... [...]
Il y a une loi : ce que nous ne faisons pas consciemment, librement, en nous-mêmes, se passe au dehors, contre notre volonté. Amen...
Homélie du 3ème dimanche de Carême, 20 mars 1960 (d’après des notes de fidèles).
Le seul mouvement de l’âme et du corps qui s’impose alors est l’agenouillement pour demander pardon dans un profond repentir...
Crier, supplier, implorer le Pardon de la Divine Trinité sur toutes nos histoires humaines si fragiles pour tant d’absence, d’inconscience, d’ignorance, d’indolence, de toute-puissance...
Pour être lavés et redressés dans l’Eau Vive de la Miséricorde infinie de Dieu et L’entendre nous dire : « Tu es ma fille, tu es mon fils bien-aimé(e), en toi est tout mon Amour... »
« Gospodi pomilouï, Gospodi pomilouï, Gospodi pomilouï... »
« Seigneur, prends pitié... » en slavon...
Que la Toute Sainte Vierge Marie recouvre de son voile de Tendresse tous ces lieux ensanglantés du monde.
Que la puissante intercession de saint Séraphin de Sarov - dont la vie a si intimement relié les terres ukrainiennes (confirmation de sa vocation monastique à Kiev) et russes (naissance à Koursk et engagement monastique à Sarov) – auprès de la Divine Trinité, guérisse nos blessures et nous ouvre la porte de l’acquisition du Saint Esprit pour témoigner de la Paix invincible du Christ...
Chaleureuses bénédictions à chacune et chacun en ce temps béni de Carême, en marche, seul et ensemble, vers Pâques...
+ Martin et le Conseil Episcopal de l’Eglise

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26 mars 2022 6 26 /03 /mars /2022 20:30

Peut-on encore croire à l’enfer ? Que nous en dit la Bible ? Paradoxalement, l’existence de l’enfer est la rançon de notre liberté.

L’enfer existe-t-il ?
Pour l’Église catholique, l’existence de l’enfer est une vérité qui ne peut être remise en cause. À l’heure de la mort, se trouvera en enfer tout homme qui, en pleine liberté, refuse l’amour divin.

L’existence de l’enfer est un dogme pour l’Église catholique, c’est-à-dire une vérité qui ne peut pas être mise en cause. Si les définitions de l’enfer ne manquent pas, le catéchisme de l’Église catholique le décrit très précisément : l’enfer, c’est « cet état d’auto-exclusion définitive de la communion avec Dieu et avec les bienheureux » (§ 1033).

« L’enfer, c’est les autres », affirmait Jean-Paul Sartre. C’est la dernière phrase de sa pièce Huis clos. Il y a une part de vérité dans cette affirmation, car tout se joue en effet dans la relation. Relation à Dieu, aux autres. Être fermé aux autres, refuser toute relation, c’est cela l’enfer.

L’enfer ou les enfers ?
L’enfer, au singulier, correspond à cette « vie sans Dieu ». Les enfers font référence au « séjour des morts », ou shéol, hérité de la culture hébraïque. Quand Jésus « descend aux enfers », il fait jusqu’au bout l’expérience de son humanité.

Singulier ou pluriel, on ne parle pas de la même chose.

En effet, comme l’affirme le Symbole des apôtres, Jésus « est mort, a été enseveli, est descendu aux enfers, le troisième jour est ressuscité des morts ».

Les enfers – ou shéol – sont alors le nom donné par les Hébreux au « séjour des morts » où vont indistinctement bons et méchants.

C’est un lieu imaginé sous terre où se trouvent les morts, ce qu’on retrouve aussi dans la mythologie romaine (inferni) ou chez les Grecs (le royaume d’Hadès).

Un lieu sans vie : « Chez les morts, on ne prononce pas ton nom, chante le psalmiste. Aux enfers, qui te rend grâce ? » (Ps 6, 5). Si Jésus descend aux enfers, c’est parce que, « vrai homme et vrai Dieu », il va jusqu’au bout de son humanité, mourant vraiment sur la croix.

Et par sa résurrection, il ouvre les portes des enfers et libère tous les défunts : « Je détiens les clés de la mort et du séjour des morts » (Ap 1,18).

Les icônes le représentent tirant les morts de leur sommeil, tirant parfois par la main Adam et Ève.

L’enfer, au singulier, c’est autre chose : c’est cette vie sans Dieu pour ceux qui sont en état de péché, comme l’a annoncé Jésus : « Allez-vous en loin de moi, maudits, au feu éternel, préparé pour le diable et pour ses anges » (Mt 25,41).

Comment se présente l’enfer ?
L’enfer n’est pas un « lieu » géographique. Jésus parle en images pour décrire l’enfer, « un feu qui ne s’éteint pas » ou encore « là où seront les pleurs et les grincements de dents ».

Les artistes ont repris ces images pour décrire la condamnation du pécheur.

« L’enfer, c’est de ne plus aimer », écrivait Georges Bernanos dans Le journal d’un curé de campagne. L’enfer serait donc cet état de rupture, éloigné de Dieu.

On est loin de la représentation géographique d’un lieu dans lequel se débattent les âmes damnées, tel que Dante ou de nombreux artistes l’évoquent.

Mais comment faire autrement qu’en l’imaginant, puisque personne n’est revenu de l’enfer pour en livrer une description fidèle ?

C’est à partir de ce qu’en dit Jésus que nous pouvons approcher ce mystère effrayant, promesse de condamnation : l’enfer, c’est « comme » se trouver « dans les ténèbres du dehors, là où seront les pleurs et les grincements de dents » (Mt 25, 30) ou encore « la géhenne où le ver ne meurt pas et où le feu ne s’éteint pas » (Mc 9, 47-48). Nous voilà avertis.

Qui ira en enfer ?
L’enfer existe, mais il serait vide… Certains fidèles n’imaginent pas que Dieu miséricordieux puisse condamner éternellement ses enfants aux flammes de l’enfer. Refuser l’amour de Dieu reste pourtant l’ultime liberté humaine.

Personne, pas même l’Église, ne peut désigner ceux qui seraient promis à l’enfer.

Après des générations effrayées par la perspective de l’enfer, les croyants d’aujourd’hui voient une contradiction insupportable entre l’infinie miséricorde de Dieu et l’existence de l’enfer.

Il y a pourtant un réel enjeu : le catéchisme catholique précise que « la peine principale de l’enfer consiste en la séparation éternelle d’avec Dieu en qui seul l’homme peut avoir la vie et le bonheur pour lesquels il a été créé et auxquels il aspire » (§ 1035).

En refusant Dieu, l’homme se condamne lui-même. « N’allons surtout pas penser que la damnation soit une vengeance de Dieu, Dieu ne se réjouit pas de voir ses enfants en enfer, souligne le père Pierre Descouvemont, théologien. Et le Christ serait un affreux maître-chanteur s’il nous prévenait d’un danger qui n’existe pas… »

Le risque de l’enfer est bien réel, et se joue d’ailleurs dès aujourd’hui : « Si ton œil droit est pour toi une occasion de péché, arrache-le et jette-le loin de toi. Car mieux vaut pour toi que périsse un seul de tes membres et que tout ton corps ne soit pas jeté dans la Géhenne » (Mt 5, 29).

Le pape François a évoqué ce combat, lors d’une rencontre dans une paroisse de Rome au printemps 2014, et appelé les mafieux à la réflexion : « Convertissez-vous, il est encore temps pour ne pas finir en enfer. C’est ce qui vous attend si vous continuez sur cette voie », martèle le pape argentin.

Ainsi donc, rendez-vous est pris pour le jugement dernier, si souvent représenté au tympan des cathédrales : « Avant même le christianisme, une tradition religieuse très ancienne évoque ce jugement aux heures de la mort, comme la pesée des âmes dans la mythologie égyptienne, explique le père Venceslas Deblock, prêtre du diocèse de Cambrai (Nord).

C’est rappeler que notre vie d’aujourd’hui va rejaillir sur notre vie après la mort. »

Comment échapper à l’enfer ?
Le refus de Dieu conduit à la tragique possibilité de l’enfer. « L’enfer consiste dans la damnation éternelle de ceux qui, par libre choix, meurent en état de péché mortel.

C’est l’homme lui-même qui, en pleine autonomie, s’exclut volontairement de la communion avec Dieu », énonce l’abrégé pratique officiel du catéchisme de l’Église catholique (n° 213).

En d’autres termes, refuser l’amour divin, c’est manifester l’orgueil d’exister par soi-même et couper ainsi toute relation à Dieu.

Peut-on pour autant considérer que Dieu permette que l’enfer soit peuplé de damnés, alors que, selon l’apôtre Paul, « Il veut que tous les hommes soient sauvés » (1 Tm 2, 4) ?

Tout ce que dit la foi chrétienne, c’est que Jésus est venu pour le salut du monde, pour sauver tous les hommes, y compris Judas et tous les bourreaux des temps modernes.

« Comment supporterai-je, Seigneur, qu’un seul de ceux que tu as faits comme moi à ton image et ressemblance, aille se perdre et s’échappe de tes mains ? », supplie sainte Catherine de Sienne.

Et pourtant, chacun est libre d’entrer dans le salut éternel que Dieu propose. Ou de le refuser, en toute liberté.

C’est ce que rappelait Édith Stein, carmélite morte à Auschwitz en 1942 : « Il appartient à l’âme de décider d’elle-même. Le grand mystère que constitue la liberté de la personne, c’est que Dieu s’arrête devant elle. »

Christophe Henning

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25 mars 2022 5 25 /03 /mars /2022 20:30

Comme il m'est aisé de vivre avec Toi, Seigneur !
Comme il m'est aisé de croire en Toi !

Quand mon intelligence s'écarte stupéfiée
ou se décourage,
quand les plus intelligents
ne voient pas plus loin que ce soir
et ignorent ce qu'il faut faire demain

Tu m'envoies la claire certitude
que Tu es
et que tu prendras soin
que toutes les voies du bien ne restent pas bouchées.

Parvenu à la crête de la gloire humaine,
je me retourne avec étonnement sur le chemin parcouru
à travers la désespérance à ce point
d'où j'ai pu renvoyer à l'humanité
un reflet de Tes rayons.

Et tant qu'il sera nécessaire
que je les reflète encore
Tu me donneras de le faire.
Quant à ce que je n'aurais pas le temps d'accomplir –
C'est que tu l'auras imparti à d'autres.

Alexandre Soljenitsyne (traduction de Daniel Struve)

Mais Soljenitsyne n’en était pas moins conscients des nuages qui s’amoncelaient à l’horizon... 

Il avait perçu la perte continue de toute conscience et l’impudence à l’origine de grands dégâts dans les âmes, et l'intensité destructrice des passions autour de la question russo-ukrainienne. Déjà en 2006, il avait qualifié de particulièrement brutale la  persécution et la répression fanatique de la langue russe.

Et le prix Nobel ne doutait pas qu'à travers les « révolutions de couleur », un encerclement complet de la Russie se préparait, aboutissant la perte de sa souveraineté. Ces pensées avaient été exprimées dans un de ses derniers entretiens. En voici un extrait :

« Ce qui se passe en Ukraine, même d'après la formulation faussement construite pour le référendum de 1991 (j'ai déjà écrit et parlé à ce sujet), constitue mon amertume et ma douleur constantes. 

La répression fanatique et la persécution de la langue russe (qui, dans les sondages précédents, était reconnue comme la langue principale par plus de 60 % de la population ukrainienne) est simplement une mesure brutale et dirigée contre la perspective culturelle de l'Ukraine elle-même. - D'immenses étendues qui n'ont jamais appartenu à l'Ukraine historique, comme Novorossiya, la Crimée et tout le Territoire du Sud-Est, sont insérées de force dans la composition de l'État ukrainien actuel et dans sa politique d'entrée avidement souhaitée dans l'OTAN. 

Pendant tout le temps d'Eltsine, pas une seule rencontre avec les présidents ukrainiens n'a été sans capitulations et concessions de sa part. L'éradication de la flotte de la mer Noire de Sébastopol (jamais cédée à la RSS d'Ukraine, même sous Khrouchtchev) est un outrage malveillant contre toute l'histoire russe des XIXème et XXème siècles ».

Or, se plaisait-il à souligner, en remémorant l’histoire commune des Russes, Ukrainiens et Biélorusses :

« Notre peuple n’a été, du reste, séparé en trois branches que par le terrible malheur de l’invasion mongole et de la colonisation polonaise.

C’est une imposture de fabrication récente qui fait remonter presque jusqu’au IXe siècle l’existence d’un peuple ukrainien distinct, parlant une langue différente du russe.

Nous sommes tous issus de la précieuse ville de Kiev « d’où la terre russe tire son origine », comme le dit la Chronique* de Nestor, et d’où nous est venue la lumière du christianisme. (…)

C’est le peuple de la « Rous » de Kiev qui a créé l’État de Moscovie. Englobés dans la Lituanie et la Pologne, Blancs-Russiens et Petits-Russiens restèrent conscients de leur identité russe et luttèrent pour n’être ni polonisés ni catholicisés. Le retour de ces terres dans le sein de la Russie fut senti par tout le monde, à l’époque, comme une 
Réunification ».
(…)
« Nous avons traversé ensemble les souffrances de la période soviétique : précipités ensemble dans cette fosse, c’est ensemble que nous en sortirons. (…)

La voie doit être ouverte toute grande à la culture ukrainienne et biélorusse non seulement sur le territoire de l’Ukraine et de la Russie Blanche, mais aussi, cordialement et joyeusement, sur celui de la Grande-Russie.

Pas de russification forcée (mais pas non plus d’ukrainisation forcée, comme on en a connu à la fin des années vingt), un développement sans entraves de nos cultures parallèles, et la classe faite dans l’une ou l’autre langue au choix des parents ».

Soljenitsyne dénonça la « répression et la persécution fanatiques » par les autorités ukrainiennes de la langue russe, privée du statut de deuxième langue officielle d’Etat, déclassée en langue étrangère ou facultative, bannie des médias et du système scolaire, alors que « plus de 60% de la population la reconnaissent comme leur langue principale ».

« L’erreur oppressive de l’Ukraine, déclara encore le prix Nobel, consiste précisément dans l’agrandissement à outrance sur des terres qui ne lui avaient jamais appartenu avant Lénine, à savoir les deux oblasts de Donetsk, toute la ceinture sud de la Novorossie (Melitopol-Kherson-Odessa) et la Crimée.

Accepter le cadeau de Khrouchtchev (de Crimée, en 1954, ndlr) n’était pour le moins pas très consciencieux. La concession méprisante de Sébastopol, sans même mentionner les victimes russes, les documents juridiques soviétiques, n’est rien de plus qu’un vol d’État. »

Il entrevit dès ce temps-là le jeu pervers des Etats-Unis dans ce positionnement anti-russe de l’Ukraine :

« La position anti-russe de l’Ukraine est exactement ce dont les États-Unis ont besoin. Les autorités ukrainiennes sont heureuses de soutenir l’objectif américain d’affaiblissement de la Russie ».

Et il prophétisa ce qui se déroule aujourd’hui sous nos yeux :
« En aucune circonstance, la Russie n’osera en aucun cas trahir les plusieurs millions de Russes qui peuplent l’Ukraine, renoncer à notre unité avec eux ».

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