Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
4 juillet 2021 7 04 /07 /juillet /2021 19:30


Mon amie Françoise a eu l’autre dimanche cette belle formule : « Le luxe, c’est l’espace, le temps et le silence. »

J’ai trouvé l’idée magnifique et très juste ; nous qui courons après l’affreux fantôme de la réussite matérielle, cette définition du luxe est sujette à nous faire réfléchir sur le sens que nous donnons à nos vies.

J’ai aussi tout de suite pensé à ces abbayes, hors du tumulte du monde, qui constellent nos campagnes et plus précisément à ces trois sœurs cisterciennes qui font la beauté de l’ordre en Provence : Silvacane, sur les bords de la Durance ; Sénanque, perdue dans les champs de lavande sur les hauteurs du Lubéron ; et le Thoronet, nichée dans les collines varoises.

Vaisseaux de pierre enchâssés dans la plus complète solitude, elles sont un havre de paix pour qui veut retrouver un sens à sa vie.

Eh oui, et si le luxe était simplement la contemplation sereine d’un paysage, en prenant le temps qu’il faut pour s’inscrire dans les minutes qui passent, dans un écrin de silence ?

Et si le véritable luxe, en toute humanité, était de se retirer du monde pour, enfin, vivre ?

Les premiers anachorètes ne pensaient pas autrement, eux qui ont fui le désordre du siècle pour construire une existence de prière au désert.

Dans le dénuement le plus complet, ils ont arrêté le cours du temps et se sont élevés vers le Très-Haut, en toute humilité, avec pour eux les grands espaces, le temps et un silence imposé.

Je songe aussi à cette petite chapelle entourée de grottes, posée sur la chaîne de collines qui sépare le gros bourg de Lambesc de La Roque-d’Anthéron, où un groupe d’ermites s’est installé au début du Moyen Âge, édifiant, dans un style roman privé d’artifice, Notre-Dame de Goiron pour y pratiquer leurs dévotions à la Vierge. Encore aujourd’hui, atteindre la chapelle demande quelques efforts, et si une route goudronnée y conduit, l’étroitesse et l’escarpement de la voie exigent un certain courage pour y parvenir.

Retirés du monde, des gens souvent simples ont pratiqué là une vie dédiée à ce en quoi ils croyaient, au milieu des stridulations des cigales bruissant dans un océan de pins.

J’ai une profonde admiration pour ceux qui ont l’audace de renoncer à l’agitation contemporaine pour n’écouter que leur cœur et rendre grâce à Dieu.

J’en suis incapable, et c’est un grand regret. Si j’ai parfois pratiqué la retraite spirituelle, consacrant quelques jours à me couper du monde dans un monastère de Normandie, l’expérience, certes enrichissante, ne m’a pas poussé à changer mon rapport au temps, à ma vie et au sens que je veux lui donner.

Cependant, les mots de mon amie Françoise résonnent en moi comme un mantra, comme une prière, et je lui sais gré d’avoir su éclairer mes pensées de la semaine.

De bonnes résolutions, voilà ce dont nous avons besoin. Illuminer nos vies d’espace, nous accorder le temps d’être, en savourant le silence, en nous et autour de nous. Comme cela paraît simple, et comme cela est difficile à mettre en pratique, il faut le reconnaître.

Peut-être pouvons-nous habiller l’interruption volontaire de nos existences de quelques notes de musique, peut-être prendre du temps pour soi, marcher, randonner.

Certains de nous ont cru, pauvres d’esprit que nous sommes, que le confinement nous conduirait à un monde d’Après, dans lequel l’expérience de la pandémie nous permettrait d’être plus sages et plus sereins. Rêve illusoire s’il en est.

Toutefois, nous pouvons encore, individuellement, cultiver le silence et la passion des grands espaces, et nous donner le luxe d’exister pour nous, en toute conscience, dans l’amour des autres, de nos proches et de ceux qui nous sont chers. Le vrai chrétien est peut-être celui qui parvient à faire le calme en lui, à apaiser ses tempêtes intimes pour faire le bien dans le respect des préceptes du Christ.

Et à pratiquer le luxe, le véritable, l’essentiel : espace, temps, silence.

De ce triptyque primordial naissent la bienveillance et la douceur, vertus cardinales pour qui se dit humain, pour qui s’affiche chrétien.

À l’image de tous ceux qui ont fait le choix de fuir le monde, nous pouvons retrouver l’indispensable, et faire de nos existences une route lumineuse vers le Ciel.

En pratiquant simplement le culte que nous avons choisi, mais résolument, en nous reliant aux autres, en tendant la main ; religio, en latin, lier, s’attacher.

Bref, avoir le luxe d’être pleinement, dans le respect d’autrui et de soi-même, arrimé dans le temps, cultivant le silence, parcourant l’espace en toute liberté.

Guillaume de Fonclare

S'abonner au Blog Seraphim

Cliquer ICI

Partager cet article
Repost0
3 juillet 2021 6 03 /07 /juillet /2021 19:30

 

S'abonner au Blog Seraphim

Cliquer ICI

Partager cet article
Repost0
2 juillet 2021 5 02 /07 /juillet /2021 19:30

Peinture originale de François Kerever

Explication de son auteur

Sur le livre : « Me ‘zo an Adsav hag ar Vuhez » ; je suis la Résurrection et la Vie.

L’Ankou, qui représente la Mort, porte un sablier et le mell beniget. Une pierre de la taille et forme d’un œuf d’autruche, dont on frappait (doucement) le sommet du crane du mourant afin de libérer son âme.

Saint Ethbin, surnommé sant Diboan (sans douleur) ou Tupedu (d’un côté ou l’autre, cad la guérison ou la mort), était un « jeune gentilhomme » d’après Albert Legrand, dominicain du XVIIème, ami de Saint Gwenolé.

Ils se promenaient tous deux et croisent un lépreux. Celui-ci les supplie de dégager ses narines encombrées de croûtes et de mucus. S. Gwenolé essaie avec ses doigts (beurk) mais le lépreux hurle de douleur. Ethbin applique sa bouche sur le nez et aspire (beurk beurk) soulageant ainsi le malheureux.

Recrachant les croûtes, il trouve dans sa bouche une perle magnifique. Le lépreux était en fait le Christ ayant pris l’aspect d’un lépreux pour éprouver sa charité. La perle symbolise évidemment la plus haute part de notre âme, celle qui nous garde unie à Dieu.

Il ne s’agit pas vraiment d’une icône, mais d’une représentation de « la bonne mort » telle que la concevait les anciens Bretons.

Dalle du tombeau de Saint-Ethbin à Chateau-Neuf, commune de Port-Mort

Saint Ethbin
abbé (VIe siècle)
Abbé breton formé par saint Samson. Moine à Taurac en Bretagne, il survécut à un raid des Francs en 556 et émigra en Irlande où il devint ermite à Kildare.
"Breton de naissance, sortait d'une famille noble. Il paraît qu'il passa fort jeune en France, puisqu'il n'avait que quinze ans lorsque ses parents le mirent sous la conduite de saint Samson, son compatriote, qui était alors évêque de Dol. Il fit de grands progrès dans la vertu, et fut attaché pendant quelques années au service de l'église de Dol. Ayant entendu un jour lire à la messe ces paroles de l'évangile: 'Celui qui ne renonce point à tout ce qu'il possède, ne peut être mon disciple', il prit la résolution de renoncer entièrement au monde. Il était alors diacre. Saint Samson, après avoir approuvé son dessein, le fit conduire à l'abbaye de Taurac, où il prononça le vœu de son engagement, en 554...  Les moines de Taurac furent dispersés vers l'an 560 par une irruption des Francs... Saint Ethbin mena la vie érémitique en Irlande, où il passa vingt ans dans une cellule qu'il s'était construite au milieu d'un bois. L'austérité de ses jeûnes, et divers miracles rendirent son nom célèbre. Il mourut dans la quatre-vingt-troisième année de son âge, sur la fin du sixième siècle, le 19 d'Octobre, jour auquel il est nommé dans le martyrologe romain. (d'après: Vie des pères, des martyrs et des saints, page 88)

S'abonner au Blog Seraphim

Cliquer ICI

Partager cet article
Repost0